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Mardi 9 mars 2004 

          REPORTAGE

Les risques du perçage corporel

Une équipe de La Facture a enquêté sur le phénomène du perçage corporel, qui devient de plus en plus populaire chez nos adolescents. L'équipe a découvert que certaines lois s'appliquent à cette activité, que des questions de santé se posent et que peu de commerçants se conforment aux règles.

Journaliste : Caroline Belley
Réalisateur : Luc Charbonneau



À la polyvalente Benoît-Vachon à Sainte-Marie-de-Beauce, le perçage corporel est, comme ailleurs, très populaire auprès des adolescents, mais pas toujours auprès des parents.

Sans aucune autorisation parentale, une adolescente de 13 ans a réussi à se faire percer à la Parfumerie esthétique Roussin. Maintenant, elle ne porte plus son bijou de nombril que ses parents ont confisqué.

La mère de la jeune fille : « On n'a pas donné d'autorisation. Elle nous avait demandé deux mois auparavant pour avoir un piercing de nombril, on avait dit non. On trouvait que ce n'était pas de son âge, tout simplement, puis elle est allée quand même se faire percer le nombril. »

Jeune fille : « Il y en a une qui est allée et ses parents ne voulaient pas. Elle est allée et elle s'est fait percer. Je me suis dit, je vais pouvoir y aller. Ils ont dit : " Est-ce que tes parents le savent que tu voulais te faire percer? " Je lui ai dit oui et elle m'a percée. »

Ça ne devrait pas être aussi simple puisque cette adolescente n'a que 13 ans. Nous avons posé la question à Me Pauline Roy, spécialiste du droit de la consommation.

Me Pauline Roy : « En bas de 14 ans, ça prend l'autorisation du titulaire de l'autorité parentale. »

Mère : « En tant que professionnelle, elle a une responsabilité de percer une mineure sans l'autorisation des parents qui sont responsables d'elle. »

La Facture a sollicité une entrevue avec la propriétaire de la boutique où cette jeune fille s'est fait percer. Cette dame a refusé toute entrevue, nous précisant toutefois qu'elle demande habituellement la signature des parents avant de percer un jeune de moins de 14 ans. Le cas de cette jeune fille serait une exception.

L'adolescente en question n'est pas la seule à avoir fait fi du refus de ses parents. Les perceurs ne s'embarrassent pas trop des autorisations parentales. En caméra cachée, nous avons visité onze commerces de perçage à Montréal. Huit d'entre eux auraient accepté de percer notre collaboratrice de 13 ans sans le consentement écrit des parents et sans jamais lui demander son âge.

Jayson Cristiano est copropriétaire de Perçage Esthétique, un des trois commerces qui a réussi haut la main le test de La Facture. Accepte-t-on d'y percer les jeunes de moins de 14 ans?

Jayson Cristiano : « On va les percer. C'est quand même assez rare, mais il faut que le parent soit en magasin, qu'il accompagne l'enfant. Même si le jeune a une lettre, on ne le prend pas. Il faut vraiment que le parent soit avec l'enfant. On explique comme il faut ce qu'il en est, si tout le monde est d'accord et si on trouve que c'est convenable… Si ce n'est pas convenable, on n'accepte pas de le faire. »

Lors de notre tournée des commerces, il n'y avait pas que la question de l'âge qui posait problème. Le perçage des lèvres et de la langue aussi. Ce type de perçage comporte des risques importants et des mises en garde s'imposent. Une adolescente de 17 ans n'a reçu aucune mise en garde lorsqu'elle s'est rendue chez un perceur montréalais.

Adolescente : « Le menton me semblait la place la plus intéressante pour le faire. Ils ont bien centré et ils ont fait un trou. »

La mère : « J'estimais qu'elle était assez vieille pour faire ses choix, malheureusement dans ce cas-ci, ça s'est avéré un choix qui va lui coûter une greffe de gencives. »

Au commerce où elle est allée, on ne lui a pas fait part des risques éventuels et l'adolescente a décidé de placer le bijou plus bas dans le but de ne pas abîmer ses dents. Malheureusement, elle a pris une mauvaise décision puisque aujourd'hui, elle doit subir une greffe de gencives. Son dentiste prélèvera de la peau dans son palais et la replacera sur les racines de ses dents dénudées. Coût de la greffe : 373$.

Dr Fancelli, le dentiste de la jeune fille : « Le problème ici a été causé par un piercing et le bouton qui était à travers de la lèvre a causé un déracinement de ses deux dents antérieures inférieures. Conséquences à long terme ? (...) Ça continue à se déraciner, on a une perte osseuse et éventuellement, elle aurait perdu ses deux dents-là. »

L'Ordre des dentistes connaît bien les multiples problèmes reliés aux bijoux de bouche.

Dr Salois, président de l'Ordre des dentistes du Québec : « C'est un grand risque qui est causé à la structure. Perte d'émail, fracture complète, perte d'os, destruction de la gencive et aussi au niveau de la langue. Chez certains patients, on voit aussi comme un engourdissement, comme une légère paralysie. »

Dans certains commerces visités, on qualifie de légende urbaine les possibilités de légère paralysie de la langue ou si vous préférez de la perte de sensation, d'engourdissement permanent, comme si la langue était toujours gelée.

Dr Salois : « La position de l'Ordre au sujet de la langue, ce serait de dire aux gens qu'il faudrait y penser deux fois avant de perforer un muscle qui a autant d'importance. »

Mère de l'adolescente de 17 ans : « Il devrait y avoir quelque chose d'écrit qui permette aux jeunes de connaître les dangers potentiels parce que ultimement, ce sont eux qui vont devoir payer, souffrir pour rétablir la situation. Je pense qu'ils devraient peut-être informer davantage. »

Même s'il n'existe aucun encadrement, le perceur a quand même une responsabilité légale.

Me Pauline Roy : « En fait, comme toute personne qui possède une certaine expertise, lorsque l'intervention qu'il pratique comporte des risques, pour obtenir un consentement éclairé, il doit informer la personne des risques qu'il est présumé connaître. »

En plus d'avoir manqué à son devoir d'information, dans  le cas de l'adolescente de 17 ans,  le perceur avait aussi  l'obligation  de demander l'autorisation parentale.  Dans ce cas précis, comme dans tous les cas où des risques pour la santé sont reconnus, l'autorisation parentale est obligatoire, et ce, même si l'enfant a plus de 14 ans.  

Jayson Cristiano : « Chaque magasin a sa politique. C'est sûr qu'il y a beaucoup de magasins qui travaillent plus pour eux-mêmes que pour le client. Ils sont là pour faire de l'argent. (...) Mais il faut s'occuper du client, lui expliquer les risques, ce qu'il en est et s'il est d'accord, on procède au perçage. »

En conclusion

La propriétaire du commerce qui a percé le nombril de la jeune fille, a offert un remboursement à ses parents. Ils ont refusé et ont l'intention de poursuivre la commerçante en dommages et intérêts. Comme il n'existe pas de réglementation précise dans ce domaine, l'autre option pour des parents inquiets ou choqués, est de déposer une plainte au Département de santé publique de leur région pour sensibiliser le système de soins de santé à cette réalité.