Air Transat leur refuse l'embarquement vers une destination soleil

Une famille de Chambly avait planifié des vacances au soleil. Le jour du départ arrive. Ils se rendent à l'aéroport pour apprendre soudain qu'ils ne partent plus! L'avion a-t-il un problème? Y a-t-il trop de passagers? Non. Un employé trop zélé leur refuse l'embarquement!

Journaliste : Pierre Craig
Réalisateur : André Gariépy
Recherchiste : Réza Dupuis

Le voyage dont rêvait cette famille n'aura jamais lieu. Le jour du départ, à l'aéroport, les préposés d'Air Transat refusent de laisser la jeune fille de 15 ans monter à bord de l'avion. Le rêve d'une semaine de vacances en famille s'écroule.

Aller en République dominicaine sans passeport

Tout commence en novembre dernier. Le père de famille choisit la République dominicaine comme destination soleil pour une raison pratique : « Étant donné qu'on n'a pas de passeports, juste des certificats de naissance, on a choisi un pays où on a déjà été auparavant, sachant d'avance que ça prenait juste un certificat de naissance avec une carte d'identité. »

Le père de famille vérifie quand même sur le site Internet d'Air Transat quelles sont les conditions d'entrée en République dominicaine pour les voyageurs qui n'ont pas de passeport. Le voyageur : « Ça dit que pour se rendre en République dominicaine, vous devez avoir soit un passeport, ou un certificat de naissance et une carte d'identité avec photo, comme un permis de conduire. »

Leur agent de voyage sait bien qu'une jeune fille de 15 ans n'a ni permis de conduire ni carte d'assurance maladie avec photo. Pour leur éviter tout problème, il effectue une vérification supplémentaire directement auprès des autorités dominicaines. Eliane Morabia, présidente de Voyages Alpha Tour : « Ils ont téléphoné au bureau du tourisme de la République dominicaine à Toronto. On leur a dit que pour une étudiante de 15 ans, une preuve de l'école avec photo devrait être acceptable. »

Air Transat refuse la pièce d'identité de la jeune fille

Convaincu que sa famille a tous les documents nécessaires, le résident de Chambly profite des spéciaux de dernière minute d'Air Transat. Il achète trois forfaits d'une semaine, tout compris, à Punta Cana. Coût total : 3300 $. Départ : le 16 novembre. Le père de famille : « On arrive à Mirabel. On présente nos papiers d'embarquement au comptoir. […] Pour moi et ma femme, ce sont deux documents, le permis de conduire et le certificat de naissance. Il y a aussi le billet d'avion, que l'on présente aux douanes en arrivant en République dominicaine. »

Les documents du couple sont en bonne et due forme. Mais quand arrive le tour de leur fille, c'est autre chose  : « Donc pour ma fille, il y avait sa carte d'identité du collège, et son certificat de naissance, émis par le gouvernement du Québec, et aussi le billet d'avion. […] On nous dit que sa carte d'école n'était pas bonne. Et la personne au comptoir nous a refusé l'embarquement. […] À partir de là, on nous demande sa carte d'assurance maladie. On leur dit qu'on ne l'a pas, parce qu'il n'y a pas de photo sur cette carte, qu'elle n'est pas reconnue comme un document légal par Air Transat, et qu'on ne peut pas s'en servir comme pièce d'identité. »

Le voyageur explique qu'il tient ces renseignements du site Internet d'Air Transat. Effectivement sur le site Internet de la compagnie, il est dit en toutes lettres que pour ce pays, la carte d'assurance maladie n'est pas acceptée. De plus, selon la loi, « la carte d'assurance maladie ne peut être exigée qu'à des fins liées à la prestation de services (…) de santé ». On ne peut donc pas l'exiger comme carte d'identité.

Le vol 776 d'Air Transat décolle sans la petite famille. Le père : « À partir de là, on nous a indiqué qu'on ne pouvait pas prendre l'avion, que ma fille ne pouvait pas prendre l'avion. Donc, le voyage était carrément à l'eau. »

Les démarches du voyageur

Le voyageur joint son agence de voyage. De son côté, l'agence prend contact avec le grossiste, Nolitour, une filiale d'Air Transat. Nolitour refuse de rembourser le résident de Chambly. Le voyageur appelle alors le consulat de la République dominicaine à Montréal. Le voyageur : « La personne à qui j'ai parlé a trouvé ça incroyable. Elle nous a dit que l'employé d'Air Transat avait été très sévère en ne nous laissant pas passer, parce qu'en principe, un enfant accompagné de ses parents, avec un certificat de naissance et une carte d'école, c'est assez. »

La Facture a aussi vérifié quelles sont précisément les conditions d'entrée en République dominicaine pour un enfant de plus de 13 ans. Selon un document du consulat à Montréal, le certificat de naissance accompagné d'un permis de conduire ou d'une carte d'étudiant sont suffisants. Air Transat aurait donc dû accepter la carte d'école de la jeune fille. D'autant plus que l'adolescente a tout tenté pour prouver son identité : « Je leur ai montré toutes les cartes que j'avais. […] C'est pas ça que ça prenait. Ils ne voulaient que la carte d'assurance maladie. »

Louis Jolin

Louis Jolin est un spécialiste du droit du tourisme : « Je me demande ce qu'on peut bien demander de plus pour prouver l'identité d'une jeune adolescente. […] Dans la mesure où il n'y a pas de carte d'identité officielle au Québec et au Canada, évidemment nonobstant le passeport, mais dans ce cas-là le passeport n'était pas exigé, elle avait tout ce qu'il fallait pour prouver son identité. […] Je ne comprends pas qu'on soit plus catholique que le pape. Dans le fond, si les autorités consulaires disent que c'est suffisant d'avoir une carte d'identité avec photo et une carte d'étudiant, alors je pense qu'il y a eu un excès de zèle. »

Plus que jamais convaincu de l'erreur du préposé à l'aéroport, le père de famille appelle le service à la clientèle d'Air Transat pour exiger un remboursement. Le voyageur : « On nous a dit que c'était dommage, mais sans plus. […] Je pouvais juste déposer une plainte formelle, faire une mise en demeure contre Air Transat, et eux l'achemineront à qui de droit. »

Air Transat admet ses torts

C'est à ce moment que le voyageur communique avec La Facture. Interrogée par La Facture, Air Transat a finalement admis son erreur. Philippe Sureau est le vice-président exécutif de Transat A.T. Pierre Craig lui demande s'il laisserait aujourd'hui passer les membres d'une famille avec une carte étudiante. La réponse de M. Sureau : «  Moi je les laisserais passer. […] Aujourd'hui, quand on regarde la situation, la pénalité qui nous est imposée quand on fait une erreur est moins importante que le coût du billet d'avion. »

Un transporteur aérien qui amène en République dominicaine un passager qui ne dispose pas des documents nécessaires peut se faire imposer une amende de 1000 $. Le passager lui, pourra quand même profiter de son séjour. Philippe Sureau : « Probablement que pour vouloir bien faire, un employé est allé trop loin. […] J'ai compris qu'à partir de maintenant, jusqu'à ce qu'on ait un problème avec les autorités dominicaines à l'arrivée, on va accepter les cartes d'étudiants. »

Philippe Sureau

La famille de Chambly a décidé, elle, de ne prendre aucun risque. À l'avenir, ils ne se déplaceront plus sans leur passeport. Mais la famille a quand même perdu une semaine de vacances et 3300 $. Comment Air Transat va-elle indemniser ces voyageurs ? Philippe Sureau : « On va leur remettre cet argent. Je pense que la question, aujourd'hui, ne se pose pas, compte tenu du fait que selon la République dominicaine, cette jeune fille aurait dû être acceptée. »

Le père de famille croit, qu'en plus du remboursement de son voyage, un dédommagement s'impose. Après tout, Air Transat admet avoir commis une erreur. Le voyageur : « Si Air Transat nous offrait une semaine à leurs frais, comme dédommagement, ce serait bien mérité. On ne demande que le minimum. »

En conclusion

Air Transat a reconnu son erreur et a remboursé complètement la famille de Chambly pour son voyage raté. Le père de famille demandait en plus un dédommagement d'une semaine de vacances gratuite pour trois personnes. Là-dessus, Air Transat est loin du compte, et n'offre que 200 $ par personne.

Air Transat s'était aussi engagée auprès de La Facture à modifier son site Internet, pour y préciser que la carte étudiante avec photo serait dorénavant acceptée. À la fin de la semaine dernière cette modification n'était toujours pas faite!