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Mardi 11 novembre 2003  

          REPORTAGE

Les erreurs d'étiquetage dans les grandes surfaces

Depuis deux ans au Québec, la plupart des magasins à grande surface sont soumis à une politique d'exactitude des prix. Le commerçant n'a plus à indiquer le prix sur chaque article; mais en contrepartie, il doit afficher ce prix sur chaque tablette. En cas d'erreur, il doit dédommager le client. Une consommatrice de la région de Montréal a décidé de faire valoir ses droits.

Journaliste : Julie Miville-Dechêne
Réalisateur : André Gariépy


Une consommatrice vigilante

Cette consommatrice avertie affirme qu'elle trouve des erreurs presque chaque fois qu'elle fait son marché. Elle décortique tous les dépliants et une fois à l'épicerie, elle redouble de vigilance au comptoir des viandes : « Chez Loblaws à Longueuil, ils ont vendu des hauts de cuisse de poulet - qui coûtent normalement 4,10 $ le kilo - dans un emballage de poitrines de poulet désossées sans peau à 16,51 $ le kilo. C'est terrible. Je pense aux gens qui ont acheté ça. C'est du vol. »

Quand elle fait son marché, elle note le coût de chaque article qu'elle met dans son panier et le compare au prix à la caisse : « J'ai trouvé beaucoup d'erreurs chez Provigo, Loblaws, des Maxi à Boucherville et à Longueuil et aussi Super C.[…] Je n'ai jamais vu d'erreurs en faveur du consommateur. Ce sont toujours des erreurs en faveur du marchand. »

Pour chaque erreur, elle invoque la politique d'exactitude des prix affichée à la caisse. Le commerçant est obligé de donner le produit s'il vaut moins de 10 $ ou de lui consentir un rabais de 10 $ si l'article coûte plus cher. En deux ans, elle a eu gratuitement 94 articles d'une valeur totale de 662 $. Elle avoue qu'elle profite des erreurs mais elle rajoute que les marchands profitent beaucoup des consommateurs.

« Souvent, j'ai le sentiment que je dérange et de plus en plus, on me reconnaît  », dit-elle. Le dimanche 31 août, elle arrive à la caisse de son Provigo de Longueuil avec encore une fois, deux paquets de viande mal étiquetés. Ce soir-là, la responsable refuse de les lui donner. La consommatrice : « J'ai insisté. Finalement elle m'a dit qu'à l'avenir elle avait comme directive du directeur, Martin Pelletier, de ne plus m'appliquer la politique. Seulement à moi. »

Impossible d'interroger le directeur du supermarché en cause. Ce dernier a référé La Facture à la porte-parole du groupe Provigo, qui chapeaute aussi les Loblaws et les Maxi. Josée Bédard, directrice principale aux affaires corporatives à Provigo : « La politique s'applique de façon équitable à tous nos clients. Je dois cependant vous dire qu'il semble y avoir eu une escalade verbale de part et d'autre. Et dans une escalade verbale, on peut entendre toutes sortes de choses. » Ceci étant dit, Provigo reconnaît sa faute. Josée Bédard : « La caissière aurait dû rembourser la cliente même dans le doute. C'est notre politique d'exactitude des prix. »

Des règles plus ou moins respectées

L'équipe de La Facture, munie d'une caméra cachée, a passé au lecteur optique dans ce même Provigo une cinquantaine d'articles. Elle a trouvé une seule erreur : un dentifrice en solde à 79 cents, vendu à 99 cents. On nous a donné le tube à la caisse sans discussion.

Les choses se sont corsées avec le rôti français, annoncé à 5,49 $ le kilo. Plusieurs rôtis étaient étiquetés à 7,69 $ le kilo. La caissière a fait appel au boucher, puis au directeur, pour expliquer cette différence de prix. Le directeur a expliqué que le rabais ne s'appliquait qu'aux rôtis bardés de gras. Pourtant, juste derrière l'étiquette « Aubaine de la semaine », les rôtis bardés en spécial et les non bardés étaient mélangés dans le même bac. Difficile de ne pas se faire prendre. Finalement, le directeur a accepté de nous vendre un rôti non bardé au même prix que les bardés.

L'Office de protection du consommateur est chargé de faire respecter la loi. George-André Levac, de l'OPC : « Nous constatons que de nombreux joueurs dans l'industrie semblent malheureusement se faire tirer l'oreille pour respecter les règles. »

Il y a deux volets à la loi : le prix annoncé doit être le prix facturé, mais en plus, le commerçant doit apposer une étiquette de prix devant chaque rangée de produits. S'il y a un oubli, le consommateur n'est pas dédommagé; mais le commerce lui, s'expose à une poursuite. En 2002, l'OPC a déposé 300 chefs d'accusation contre onze magasins. À 2000 $ par étiquette manquante. Rona, au Carrefour Laval, risque de recevoir 58 000 $ d'amendes. Un Loblaws de Saint-Laurent, 52 000 $.

Il manque des étiquettes

La Facture est allée voir si la situation a changé. Chez Rona, il manquait 18 étiquettes sur les tablettes : une rangée complète d'articles divers sans prix. Chez Loblaws, nous avons noté qu'il manquait 20 étiquettes pour des articles divers, des bols en pyrex au jus de palourdes.

Josée Bédard, de Provigo : « Nos enquêtes internes démontrent que nos taux d'erreur sont vraiment minimes parce que dans une entreprise où on a 3 millions d'opérations par semaine, 150 millions d'opérations par année, c'est vraiment marginal.  »

Chez Couche-Tard, la plus grande chaîne de dépanneurs au pays, les ratés sont encore plus évidents. On a vu des présentoirs complets sans étiquettes et surtout, il n'y avait aucune affiche sur la politique d'exactitude des prix. La Facture a eu droit à toutes sortes d'explications des caissiers. Un caissier n'est pas au courant de cette histoire d'affiches. Un autre caissier affirme que les magasins ne sont pas obligés d'avoir cette affiche en magasin.

Ce caissier a tort. Au Québec, le marchand doit choisir : il met le prix sur chaque article - un prix unitaire - ou encore il ne met qu'une seule étiquette de prix sur la tablette. Dans ce cas, l'affiche est obligatoire. Couche-Tard prétend qu'elle indique le prix sur chaque produit et c'est pour ça qu'il n'y a pas d'affiche. Un porte-parole de Couche-Tard, Stéphane Gonthier, affirme que l'étiquetage des prix est une règle à l'interne : « S'il y a des magasins qui n'ont pas un prix unitaire, il y a un problème dans ce magasin, merci de m'en informer, on va intervenir tout de suite. On va s'assurer que tous les prix sont étiquetés. »

Des cas isolés? Difficile à croire. L'enquête de La Facture démontre que tous les Couche-Tard visités au hasard ont opté pour l'étiquetage sur les tablettes. Ils devraient donc tous avoir des affiches. Surtout que la loi l'exige depuis deux ans. Selon l'OPC, quiconque a dépassé cette période est en infraction.

Stéphane Gonthier, de Couche-Tard : « C'est facile sur papier, en petit comité, de déterminer les lois. Mais la réalité sur le terrain, c'est que vous avez des employés, vous avez un taux de rotation, vous avez de nombreuses surfaces, vous devez être en mesure d'imprimer sur place les étiquettes. » Couche-Tard a promis de se conformer à la loi et d'afficher sa politique dans ses 500 dépanneurs dès novembre.

Cette consommatrice vigilante de la région montréalaise est l'une des rares qui prend la peine de porter plainte à l'OPC, en martelant, facture à l'appui, que son Provigo a fait 21 erreurs en quatre mois. Georges André Levac, de l'OPC : « C'est nettement préoccupant, à tout le moins inquiétant, qu'une même entreprise, avec une même cliente, commette autant d'erreurs. »

En conclusion

Provigo a offert 40 $ en dédommagement à cette consommatrice de la région montréalaise, à la suite de sa plainte à l'OPC. La consommatrice a refusé ce règlement, le jugeant insuffisant.

Couche-Tard avait promis d'afficher la politique d'exactitude des prix dans tous ses magasins dès ce mois-ci. La Facture a visité six dépanneurs le 6 novembre. Aucun n'affichait la politique d'exactitude des prix exigée par la loi et il manquait encore plusieurs étiquettes sur les tablettes.

Hyperlien

Office de la protection du consommateur
Pour consulter la fiche pratique de l'OPC sur l'indication obligatoire des prix et pour porter plainte contre un commerçant fautif.

Vous pouvez revoir Place publique avec la journaliste Julie Miville-Dechêne et l'animatrice Madeleine Roy.