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Mardi 9 septembre 2003  

          REPORTAGE

Les contrats : des documents souvent illisibles et incompréhensibles

Vous êtes-vous acheté un téléviseur ou encore une voiture dernièrement? L'animateur de La Facture, Pierre Craig, s'est acheté un véhicule neuf en mai dernier. Mais avant de s'installer derrière le volant, il a dû signer cinq contrats. Il les a parcourus un peu rapidement. Ce n'est qu'après avoir signé qu'il a découvert que l'une des clauses lui interdisait d'utiliser son véhicule pendant plus de 30 jours à l'extérieur du Québec sans un consentement écrit de la compagnie qui finance l'achat.

Pierre Craig a tout de même eu de la chance : ses contrats étaient lisibles. Ce qui est loin d'être toujours le cas.

Journaliste : Alain Roy
Réalisateur : Louis St-Pierre


Dans une vie, on en voit passer des contrats! Toutes sortes de contrats, que l'on signe souvent les yeux fermés. Mais si on ouvre grands les yeux, qu'est-ce qu'on voit au juste? Des petits caractères? Des clauses longues et incompréhensibles?

Pour se faire une idée, La Facture a choisi cinq contrats au hasard. D'abord, quatre contrats préimprimés et non négociables (téléphone cellulaire, carte de débit, location de voiture, financement d'achats). Et pour finir, un prêt hypothécaire, le seul de ces contrats pouvant être négocié.

Un petit groupe de consommateurs a accepté de les décortiquer pour La Facture. Quatre spécialistes ont aussi participé à l'exercice : Judith Renaud, optométriste, Benoît Moore, professeur de droit, Jean-Yves Morin, linguiste, et Madeleine Plamondon, directrice du Service d'aide aux consommateurs de Shawinigan.

Les petits caractères

Les consommateurs recrutés par La Facture se butent à un premier obstacle lorsqu'ils tentent de déchiffrer les contrats : des caractères si petits qu'ils sont à peine lisibles. L'un d'entre eux fait le constat suivant : « Sur place, je n'aurais pas la patience de lire des caractères [petits] comme ça. Je ne porte pas de lunettes, mais j'en aurais besoin pour les lire ». Un autre consommateur avoue qu'il ne prend pas le temps de lire de telles clauses lors de l'achat d'un téléviseur : « C'est long, c'est fastidieux; je veux ma télé ».

L'optométriste Judith Renaud

Quant aux spécialistes qui collaborent à l'enquête de La Facture, ils en arrivent au constat suivant : trois des cinq contrats sont pénibles à lire. C'est le cas notamment du contrat de crédit « Achetez maintenant et payez plus tard » de Crédiplan (Banque Nationale). Certaines parties du contrat de location de voitures de Toyota sont illisibles : « Je n'ai pas été capable de lire ce côté-là du contrat. Pourtant, je suppose qu'il y a des choses importantes dans cette section. C'est sûr, toutes les garanties sont là ». - Madeleine Plamondon, directrice du SAC

Un autre document est lui aussi en partie illisible, selon Mme Plamondon : le verso du contrat de service du téléphone cellulaire Telus. Cette section est tellement pâle qu'il est impossible de lire quoi que ce soit : « Les consommateurs pourraient aller en cour avec un contrat aussi pâle ». - Madeleine Plamondon, du SAC.

Une clause illisible peut être annulée par un tribunal. Des articles de la Loi sur la protection du consommateur et du Code civil du Québec le permettent. Mais ils sont très rarement invoqués devant les tribunaux.

Des documents incompréhensibles

Une fois que le consommateur réussit à lire le contrat, un autre obstacle se présente : les textes sont souvent incompréhensibles. Le commentaire d'une consommatrice : « Il faudrait que j'aille à l'université quelques années pour pouvoir les comprendre; mais même là, je ne suis pas sûre de pouvoir comprendre ces contrats-là ».

Jargon, termes techniques inconnus, phrases interminables : il y a de quoi s'y perdre. On a même découvert dans la clause d'un contrat hypothécaire une phrase de 122 mots! Le linguiste Jean-Yves Morin : « En haut d'une trentaine de mots, on est absolument incapable, sans revenir sur la phrase plusieurs fois, de comprendre son contenu ». Le linguiste a calculé qu'il faut à peu près une heure pour lire attentivement un contrat.

Attention aux clauses qu'on ne lit pas!

Le consommateur devrait lire attentivement les contrats qu'il signe, car on accepte parfois des clauses étonnantes! Par exemple, dans le contrat de la carte de débit Accès-D de Desjardins, une clause mentionne que les « opérations effectuées avec ces cartes sont assujetties à des conditions et règles particulières édictées de temps à autre ». Cette clause signifie que la banque pourra changer les règles quand elle le voudra, conclut le professeur en droit Benoît Moore.

Il y a aussi cette clause, perdue au verso du contrat de Telus, qui engage le consommateur à ne pas intenter de recours collectif. La Facture a fait des vérifications sur le sujet et cette clause de Telus est de toute façon invalide au Québec. En effet, même dans un contrat, personne ne peut renoncer à un droit accordé par une loi.

« Il y a une pression tout le temps. La pression, c'est que tu signes. Si tu ne signes pas, tu vas ailleurs. Si tu vas ailleurs, ce sera le même contrat. » - Un consommateur

Une complexité volontaire?

Des conditions tirées par les cheveux, écrites en caractères minuscules, avec des phrases trop longues et compliquées... Pourrait-on dire que ceux qui écrivent ces contrats pratiquent la complexité volontaire?

« Est-ce qu'ils font exprès pour décourager la lecture? Je vous dirais, d'un côté, peut-être que oui. D'un autre côté, je vous répondrais, de façon un peu caustique : pourquoi feraient-ils cela? Parce que de toute façon, qu'on les lise ou non, ils ne modifieront pas leurs contrats. » - Benoît Moore, professeur de droit

M. Moore ajoute que le client est en partie responsable et que, s'il ne comprend pas certaines clauses, il devrait avoir le réflexe de poser des questions.

Madeleine Plamondon, du SAC

Pour Madeleine Plamondon, du SAC, si les contrats étaient bien écrits et faciles à lire, les gens les liraient. Elle estime qu'il faudrait établir des normes dans ce domaine : « Il faudra en venir à dire que tout contrat doit être écrit avec une grosseur de caractère minimale, et que les exclusions, les restrictions et les limites d'un contrat doivent être en caractère gras. Il va falloir aller plus loin ».


Les lois vous protègent-elles contre ce type de contrats? Non. Seul le Code civil stipule que toute clause d'un contrat doit être lisible et compréhensible pour une personne raisonnable. Mais pour utiliser cette loi, le consommateur doit prouver que son contrat lui a fait subir un préjudice. Très peu de gens utilisent ce recours.

Est-il possible de faire mieux? Oui. Aux États-Unis, certains États vont jusqu'à réglementer le nombre de syllabes par mot et le nombre de mots par phrase pour s'assurer que les contrats seront accessibles et compréhensibles

Hyperliens

Article 1436 du Code civil

Loi sur la protection du consommateur

Service d'aide au consommateur - Shawinigan

Chambre des notaires du Québec

Barreau du Québec