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L’obsession du N.-B. pour le nucléaire menace son avenir énergétique, dit un spécialiste

Une éolienne

Le Nouveau-Brunswick a une ressource éolienne exceptionnelle, dit Yves Gagnon, spécialiste des énergies vertes.

Photo : Radio-Canada / Nicolas Steinbach

Le Nouveau-Brunswick fait fausse route en misant sur le nucléaire et en ignorant le potentiel de la boucle de l'Atlantique et des énergies vertes, croit Yves Gagnon, spécialiste des énergies renouvelables à l'Université de Moncton.

Dans son Plan intégré des ressources, publié en juillet, Énergie NB a dit être d'avis que la boucle de l'Atlantique est trop dispendieuse. Un mois plus tôt, le gouvernement néo-écossais a lui aussi émis de sérieuses réserves sur ce projet de distribution électrique proposée par Ottawa.

Dominic LeBlanc.

Dominic LeBlanc, ministre des Affaires intergouvernementales, prévient que l'aide fédérale offerte dans le cadre de la boucle de l'Atlantique pourrait servir ailleurs au pays.

Photo : La Presse canadienne / Justin Tang

Pour Dominic LeBlanc, ministre des Affaires intergouvernementales, si les élus des provinces de l'Atlantique ne croient pas en ce projet, l'argent peut servir ailleurs.

D'après lui, leurs homologues du Manitoba, la Saskatchewan et de l'Alberta ont eux aussi manifesté de l'intérêt pour développer des projets de distribution régionale.

On peut trouver d’autres endroits où investir des milliards de dollars dans l’énergie propre. Les premiers ministres des Prairies m’ont par exemple parlé d’une boucle des Prairies […] Alors si le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse n’ont pas besoin de l’argent du fédéral, nous aurons d’autres partenaires qui seront prêts à travailler avec nous, dit Dominic LeBlanc.

Miser sur le nucléaire à tout prix

Pour Yves Gagnon, professeur d’ingénierie à l’Université de Moncton et spécialiste des énergies renouvelables, il ne faut pas s'étonner de la prise de position d'Énergie NB.

Il estime que les réserves de la société de la Couronne à la boucle de l'Atlantique sont liées à son souhait de développer de petits réacteurs nucléaires modulaires (PRM) et leur rôle dans la transition énergétique.

Dans ses projections, la société de la Couronne estime que cette technologie pourrait avoir une capacité de production électrique pouvant atteindre 750 MW d'ici 20 ans, soit plus que la capacité de la centrale Pointe Lepreau.

Énergie NB prédit aussi que cette technologie permettra la création de 730 emplois par année sur 15 ans, apportera un milliard de dollars au PIB de la province et générera des recettes de 12  millions pour le gouvernement.

La centrale nucléaire de Point Lepreau

Des recherches sont menées à la centrale nucléaire de Point Lepreau, au Nouveau-Brunswick, afin de développer de petits réacteurs modulaires.

Photo : Radio-Canada / Michel Nogue

D’après Yves Gagnon, ce sont surtout les retombées économiques associées aux PRM qui suscitent de l’intérêt à Fredericton.

Ça démontre que [pour le gouvernement] la création d’emplois à Saint-Jean est plus importante que tout le secteur de l’électricité au Nouveau-Brunswick, analyse-t-il.

Une approche qui ne tient pas la route

Puisque la province a peu de chance de se positionner comme un joueur clé dans le développement des PRM, les ambitions de Fredericton mettent en péril l'avenir énergétique de la province, dit Yves Gagnon.

Pour se défaire de sa dépendance aux énergies polluantes, la province aurait intérêt à miser sur des technologies éprouvées, analyse-t-il. Elle dispose d’ailleurs de tout ce dont elle a besoin pour le faire.

Le Nouveau-Brunswick a une ressource éolienne exceptionnelle sur le plan mondial. Il n’y a pas beaucoup d’endroits sur la planète qui ont des vents aussi bons que ceux que nous avons ici.

Une citation de Yves Gagnon, spécialiste des énergies renouvelables

Pourtant, dans son rapport, Énergie NB souligne à de nombreuses reprises que les énergies renouvelables sont intermittentes et ne peuvent produire de l’électricité en tout temps notamment lorsqu'il n'y a pas de vent ni de soleil.

La clé, dit Moe Qureshi, directeur du programme de changement climatique au Conseil de conservation du Nouveau-Brunswick, c’est de décentraliser la production électrique en multipliant les sources renouvelables un peu partout sur le territoire.

C’est vrai qu’il y a un problème d’intermittence avec l’énergie éolienne et l’énergie solaire, mais il peut être surmonté en investissant davantage dans ces sources de production, dit-il.

Augmenter la capacité de stockage des énergies renouvelables, notamment grâce aux batteries, et améliorer l'efficacité énergétique des ménages pour réduire la demande en électricité dans la province est tout aussi essentiel, ajoute Moe Qureshi.

Des défis surmontables

À l’échelle de la planète, de nombreux pays se sont tournés vers les énergies renouvelables sans pour autant souffrir de l'intermittence de leur réseau.

Ça fait 15 ans qu’Énergie NB nous martèle que l’intermittence, on ne peut pas régler ça. Soit ils sont déconnectés de la réalité du secteur de l’énergie sur le plan mondial, soit ils nous prennent pour des "caves".

Une citation de Yves Gagnon, professeur à l'Université de Moncton

Au Danemark, 50 % de l’électricité est produite grâce à l’énergie éolienne, dit M. Gagnon. En Allemagne, c’est 25 %, un pays, qui est aussi doté d’une importante capacité solaire.

Au Nouveau-Brunswick, nos travaux ont démontré qu'on a la même ressource solaire que l’Allemagne, mais nous n’avons une capacité [de production] 40 000 fois moins importante!, lance le spécialiste. On parle de puissances économiques mondiales et ils opèrent sans problème leur réseau électrique.

Panneaux solaires dans  un champs

Le Nouveau-Brunswick sous-exploite son potentiel en énergie solaire, selon Yves Gagnon, professeur à l'Université de Moncton.

Photo : Radio-Canada

C’est en diversifiant son portefeuille énergétique – avec de l’éolien, du solaire, de la biomasse, de l’hydroélectricité et du gaz naturel comme sources d’appoint en période de forte demande – qu’on arrive à surmonter les défis liés à l’intermittence des énergies vertes, ajoute-t-il.

Toutes ces sources, on en a au Nouveau-Brunswick, illustre Yves Gagnon.

À cela, il faut aussi ajouter un réseau de distribution moderne, d’où l'intérêt de la boucle de l'Atlantique.

La stratégie d'Énergie NB et sa feuille de route des dernières années laissent Yves Gagnon perplexe.

On met tout ça ensemble – l'opposition à la boucle, les investissements douteux, la mauvaise gestion financière –, c’est à se demander si la direction d’ÉNB a les compétences pour gérer une entreprise de service public dans le domaine de l’électricité.

Une citation de Yves Gagnon, professeur à l'Université de Moncton

Les provinces persistent et signent

Au ministère des Ressources naturelles du Nouveau-Brunswick, on dit ne pas craindre de voir les milliards avancés par Ottawa s'envoler vers l'Ouest.

Les négociations portant sur ce projet sont toujours en cours, même si d’autres options moins coûteuses pour les contribuables sont envisagées.

Il est peu probable que la boucle atlantique puisse être construite et pleinement opérationnelle d'ici 2030, ce qui signifie que des investissements supplémentaires pourraient être nécessaires pour respecter les réglementations sur le charbon de 2030 a indiqué le ministre Mike Holland dans une déclaration écrite.

En Nouvelle-Écosse, une déclaration du ministère des Ressources naturelles et des Énergies renouvelables offre le même son de cloche. Le gouvernement souhaite privilégier des solutions moins coûteuses pour les contribuables.

Le gouvernement néo-écossais souhaite notamment augmenter les échanges en énergie avec le Nouveau-Brunswick en faisant construire une ligne de transmission jusqu’à Pointe Lepreau, un projet qui permettrait d’intégrer des énergies renouvelables et l’électricité produite par les PRM.

Les coûts sont estimés à 1,4 milliard de dollars, beaucoup moins que la boucle atlantique. Nous demandons un appui du fédéral sous forme de subvention, a indiqué le ministre néo-écossais Troy Rushton dans un courriel.

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