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    Mardi 19 h 30

    REDIFFUSION SUR RDI
    Samedi 17 h 30
    Dimanche 2 h 30


    - Retour en douce des implants mammaires au gel de silicone -
    Pour bien des gens, les implants mammaires au gel de silicone sont synonymes de complications et même de danger pour la santé. Ce n'est pas pour rien que le Canada et les États-Unis les ont retirés du marché au début des années 90. On craignait, entre autres, que ces implants mammaires causent des cancers du sein. Depuis leur retrait du marché, Santé Canada a malgré tout permis que des milliers de femmes reçoivent ces implants mammaires au gel de silicone. Pourquoi?

    Journaliste: Johanne Faucher
    Réalisateur: Jean-Claude Burger
    Recherchiste: Claude Laflamme


    __________


    Les chirurgiens plastiques n'ont pas besoin de voir les bourgeons ou de sentir la chaleur du soleil pour savoir que le printemps est arrivé. Il y a un signe qui ne les trompe pas: la forte demande pour les augmentations mammaires.

    « J'ai vu la publicité du chirurgien en feuilletant un magazine, raconte Michelle. On y détaillait aussi un peu ses qualifications. C'était assez impressionnant, alors j'ai pris rendez-vous avec lui. »

    Pour la jeune femme, ce fut le début d'une aventure pénible.

    « Je lui ai expliqué que j'avais une asymétrie, que je n'avais donc pas les seins exactement de la même grosseur. Il m'a montré des photos de chirurgies qu'il avait réalisées sur des filles qui étaient dans la même situation que moi. Les résultats étaient bien. »

    Les résultats sont différents selon l'implant choisi. Il y en a trois types: celui au soluté physiologique (eau salée), l'ancien au gel de silicone et le tout nouveau, l'implant au gel cohésif de silicone.

    Le chirurgien a laissé Michelle choisir l'implant, mais en lui disant que celui au gel de silicone donnait un meilleur résultat et qu'il était la meilleure solution des trois, parce qu'il donnait le résultat le plus naturel et aussi parce que ce n'était pas le plus coûteux.

    Moratoire

    Michelle choisit l'implant classique au gel de silicone au coût de 6000 $. Quelques mois après l'opération, une surprise l'attend.

    « J'ai vu un article dans La Presse qui parlait de remettre sur le marché les prothèses de silicone, se souvient-elle J'ai trouvé ça bizarre parce que je ne savais pas qu'elles n'étaient plus sur le marché. C'est vraiment à ce moment-là que je me suis posé des questions. »

    Michelle avait 9 ans quand le scandale du silicone a éclaté. Des milliers de femmes ont alors signalé avoir des problèmes avec leurs implants. Des chercheurs craignaient que les implants au gel de silicone provoquent, entre autres, le cancer. En 1992, le Canada et les États-Unis les ont donc retirés du marché le temps que l'on prouve leur sécurité.

    « Les implants au gel de silicone n'ont jamais disparu, affirme le chimiste Pierre Blais. Le ministère de la Santé autorise leur utilisation, comme il l'a toujours fait, mais c'est fait un petit peu malhonnêtement. »

    Pierre Blais travaillait à Santé Canada. Il a analysé près de 10 000 implants mammaires, des cas problèmes qu'on lui envoyait pour expertise. C'est à la suite de ses recommandations qu'un moratoire sur les implants au gel de silicone a été imposé.

    Ces implants sont toujours disponibles par un programme d'accès spécial. Santé Canada les autorise en effet dans les cas « d'urgence, lorsque les thérapies conventionnelles ont échoué, ne sont pas disponibles ou ne conviennent pas au traitement d'un patient ».

    « Pour les implants mammaires, c'est réellement une supercherie, soutient Pierre Blais. Personne n'a un besoin urgent, un besoin absolument essentiel d'un implant de ce genre, même pas une personne cancéreuse. »

    Le Collège des médecins s'interroge

    Omer Boudreau
    La facture a appris que depuis et malgré le moratoire, 24 000 canadiennes ont reçu des implants au gel de silicone. La grande majorité des chirurgiens qui en font la demande auprès de Santé Canada les obtiennent. Le Ministère n'a refusé que 45 demandes.

    Était-il convaincu qu'il n'y avait aucune autre option possible pour toutes les femmes qui ont reçu de tels implants?

    « Il n'appartient pas à Santé Canada de le déterminer, répond le directeur général de la Direction des produits thérapeutiques, Omer Boudreau. C'est une évaluation qui est faite par des médecins compétents. »

    Donc, Santé Canada interdit la vente des implants mammaires au gel de silicone, mais il en donne l'accès à qui en fait la demande. Une logique qui échappe même au président du Collège des médecins du Québec, le Dr Yves Lamontagne.

    « Si n'importe qui peut obtenir une dérogation, quel est l'intérêt d'avoir mis en place un moratoire? Si tous ceux qui demandent la dérogation l'ont, pourquoi ont-ils fait ça? Aussi bien ne pas le faire! »

    Contraction capsulaire

    Jusqu'ici, aucune étude n'a prouvé que les implants au gel de silicone provoquent le cancer ou aucune autre maladie. Santé Canada fait néanmoins de nombreuses mises en garde sur son site Internet.

    On peut y lire, par exemple, que « la plupart des femmes portant des implants mammaires éprouveront des complications, soit rupture, douleur, déformation, infection grave ou une condition appelée contraction capsulaire ».

    Pour Pierre Blais, les femmes ayant des implants, qu'ils soient au gel de silicone ou au soluté physiologique, courent effectivement des risques.

    « Avec le temps, une couche mince de tissu se forme autour de l'implant, et le tissu s'épaissit graduellement pour atteindre une épaisseur de presque trois millimètres dans certains cas. C'est toujours flexible, mais ça se forme toujours. C'est inévitable. »

    Cette capsule fibreuse est une réaction naturelle du corps humain face à un corps étranger. Elle peut se contracter et se durcir. Quand ça arrive, ça peut faire très mal. Et ça arrive plus souvent avec les implants au gel de silicone.

    Comme l'explique Pierre Blais, le tissu qui recouvre l'implant ressemble à du verre broyé. Si une plaque de ce tissu, qui est aussi dur que du verre, se détache, elle peut facilement endommager l'implant. Et c'est ainsi, croit-il, que plusieurs implants ont été percés. Il est convaincu que tous les implants mammaires sont dangereux.

    « L'implant est à moins d'un centimètre de trois organes principaux, il est juxtaposé au système lymphatique, il y a au minimum trois ou quatre vaisseaux sanguins importants à proximité. Quiconque croit qu'une situation comme celle-là ne peut pas avoir de conséquences néfastes à long terme croit certainement au Père Noël. »

    Consentement signé

    Le plasticien André Camirand est un des spécialistes des augmentations mammaires à Montréal. Il en réalise quatre par jour.

    « Toute chirurgie représente un danger, et toute substance risque de ne pas être parfaite, dit-il. C'est manufacturé, il peut y avoir des défauts. La perfection n'existe pas en ce bas monde. »

    « Les patientes doivent bien connaître les conséquences, les inconvénients, les malaises, les douleurs, les cicatrices [liées à l'intervention] et nous, nous mettons beaucoup l'accent là-dessus, poursuit-il. En plus, nous leur remettons un document qu'elles doivent lire puis signer pour indiquer qu'elles l'ont bien lu et qu'elles l'ont compris. »

    Michelle n'a jamais signé un tel document. Et son chirurgien ne lui aurait pas dit qu'il devait demander l'autorisation à Santé Canada pour utiliser des implants au gel de silicone.

    « Jamais il ne m'a parlé de ça, jure-t-elle. [S'il l'avait fait], je pense que les recherches que j'ai faites dernièrement sur les implants au gel de silicone, je les aurais faites avant. Avant de dire oui. »

    Choix éclairé

    Le chirurgien de Michelle a refusé d'accorder une entrevue à La facture. Il a toutefois précisé qu'il donne toujours à ses patientes l'information concernant la demande d'autorisation à faire auprès de Santé Canada pour utiliser des implants mammaires au gel de silicone.

    Avec l'aide d'une collaboratrice, La facture s'est rendue à son bureau pour une consultation. Et il a bien proposé des implants au gel de silicone à la collaboratrice sans mentionner qu'il devait demander une autorisation à Santé Canada pour les utiliser.

    À sa décharge, il faut dire qu'il est loin d'être le seul. La facture a poursuivi son enquête chez d'autres plasticiens et trois chirurgiens sur quatre ne lui ont pas parlé d'autorisation spéciale pour les implants au gel de silicone.

    Dr Yves Lamontagne
    « Si le plasticien suggère un implant en silicone, il doit expliquer à la patiente pourquoi il le suggère et il doit lui dire aussi qu'il doit demander une dérogation à Santé Canada, souligne le Dr Yves Lamontagne. Parce que pour les implants de silicone, il faut demander une dérogation. »

    Les médecins ont donc l'obligation de donner cette information sans quoi, dit le Collège des médecins, ils s'exposent à des sanctions disciplinaires.

    « C'est un élément d'information susceptible de changer la décision de la patiente », déclare Me Suzanne Bisaillon, une avocate spécialisée en droit de la santé.

    « Le Code civil dit que toute personne doit consentir au soin, et quand on dit consentir, il faut que ce soit [un choix] éclairé, ajoute-t-elle. Pour que ce soit [un choix] éclairé, il faut que toute l'information soit révélée à la patiente. »

    Remplacer les implants?

    Tous les chirurgiens consultés au cours de l'enquête terrain de La facture ont parlé du problème de contraction de la capsule fibreuse. Mais ils ont tous dit que les risques étaient minimes.

    Michelle, elle, est aux prises avec cette complication. Et ça lui cause des douleurs. Elle est donc retournée voir son chirurgien.

    « Il a vérifié et il m'a dit qu'en effet, c'était ça le problème, et qu'il devait m'opérer. Il m'a dit que ce n'était pas une grosse opération, mais que le problème pouvait revenir, explique-t-elle. L'autre solution serait de remplacer mes implants par un autre type d'implants. »

    Un tel changement lui coûterait des milliers de dollars. « En fait, on ne s'en sort pas gratuitement. Ça, c'est certain. »

    Informer: un devoir professionnel

    Dr Lucie Duclos
    La Dre Lucie Duclos ne dramatise pas les dangers du silicone. Quand elle informe ses patientes qu'elle doit demander l'autorisation à Santé Canada pour les utiliser, la grande majorité d'entre elles choisissent toutefois les implants au soluté physiologique.

    « C'est important [de leur donner cette information], parce que ça les fait réfléchir. Si Santé Canada interdit quelque chose, c'est qu'il doit y avoir des motifs sérieux[de le faire]. Alors, je pense que ça fait partie des informations que l'on doit donner aux patientes. »

    « Quand on va voir des professionnels, que ce soit moi qui vais voir un chirurgien, quelqu'un qui achète une maison et qui va voir un notaire ou quelqu'un qui a des difficultés et qui va voir un avocat, on s'attend à voir quelqu'un qui va nous éclairer, croit Michelle. Quand on sort de là, on est supposé savoir où on s'en va. »

    En conclusion

    La dernière fois que La facture a joint Michelle, à la fin avril, une douleur aiguë aux seins l'empêchait de dormir. Elle n'a pas le choix, elle doit se faire réopérer. Elle cherche actuellement un autre chirurgien.



    Hyperliens
    Augmentation et reconstruction mammaire
    PasseportSanté.net - La santé sans frontières

    Votre santé et vous - Implants mammaires
    Santé Canada

    Forum public sur les implants mammaires
    Santé Canada

    Groupe consultatif d'experts - Implants mammaires remplis de gel de silicone
    Santé Canada

    Groupe consultatif d'experts sur les implants mammaires - Compte rendu des délibérations
    Santé Canada

    Implants mammaires au gel de silicone
    Société canadienne du cancer

    Breast implants
    Site Internet sur les implants mammaires de la U.S. Food and Drug Administration (en anglais)



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