Émission 246

Le mardi 8 avril 2003

 

Le propriétaire d'une animalerie à Outremont élève et vend depuis huit ans des oiseaux. Comme pour des milliers de petites entreprises, c'est une grosse compagnie américaine, Global Payment, qui gère, au nom de l'institution financière, le système de paiement électronique, c'est-à-dire le paiement par carte de crédit et de débit. Récemment, à cause d'une petite erreur, ce commerçant d'Outremont a vu s'envoler tous ses profits.

 

La compagnie qui gère son système de paiement vide son compte par erreur

Depuis trois mois, un commerçant reçoit des lettres qui le mettent dans tous ses états. Des titulaires de cartes de crédit, qui n'ont jamais mis les pieds dans ce commerce, sont facturés pour des transactions qui auraient été faites dans la boutique. Parce que ces gens contestent les transactions, la compagnie Global Payment demande au commerçant de prouver qu'elles ont été faites chez lui. S'il ne le prouve pas, son compte sera débité des montants des transactions. On menace de débiter son compte parce que, dans les ordinateurs de Global Payment, il apparaît que ce commerçant a reçu les sommes associées à ces transactions qui n'auraient pas été faites chez lui. L'enjeu est important. Une quinzaine de transactions ont été faites, totalisant près de 5000 $.

Le commerçant voudrait bien se défendre, mais il a les mains liées. Global Payment voit sur ses écrans que ce commerçant a été crédité pour les transactions. Pourtant, dans le compte de ce commerçant, on ne trouve aucun dépôt qui pourrait correspondre à une de ces transactions.

 

Que s'est-il passé?

Le commerçant d'Outremont se présente à sa succursale de la Banque Nationale pour demander des explications. Denis Dubé, porte-parole de la banque, affirme qu'une représentante du service à la clientèle a fait son possible pour l'aider. « Elle a évidemment contacté Global Payment pour essayer de débroussailler toute l'histoire, et elle a également, le 6 janvier, envoyé des télécopies à Global Payment leur demandant des explications, des éclaircissements au nom du client. »

Pendant ce temps, le commerçant renvoie chez Global Payment chacune des demandes de preuves de transactions qu'il a reçues. Il explique qu'il ne peut fournir de preuves des transactions puisqu'elles n'ont pas été faites chez lui. Pour appuyer ses dires, il envoie des photocopies des bandes journalières de son terminal où, effectivement, les transactions n'apparaissent pas. Malgré cela, en janvier, on commence à débiter son compte des sommes liées à ces transactions. « C'est la panique, c'est la panique totale, c'est la mort, c'est la fermeture. »

Le problème, c'est que Global Payment débite le compte du commerçant des sommes qui ne lui ont jamais été créditées. C'est le fond de roulement de l'entreprise qui s'envole à coup de milliers de dollars. Mostapha Ward, le comptable du commerçant, a essayé, à plusieurs reprises, d'intervenir auprès de Global Payment pour qu'on arrête de débiter son compte. « J'ai appelé, j'ai dit : “Vous allez le ruiner”. Ils m'ont dit : “Nous, on ne peut rien faire, on a envoyé la requête. Ils vont étudier tout ça”. »

 

Erreur dans le système informatique

Global Payment réalise que le commerçant est probablement victime d'une erreur. La compagnie déclenche une enquête qui progresse lentement, tandis que le compte bancaire du commerçant se vide rapidement.

Le comptable abandonne la partie, impuissant. Le 4 mars, le commerçant téléphone à sa succursale bancaire et mentionne qu'une équipe de La Facture s'intéresse à son histoire. Soudainement, la banque se retrousse les manches et télécopie, le jour même, des demandes d'informations chez Global Payment. De son côté, la direction des communications de la Banque Nationale fait pression pour que les réponses viennent et vite. « Nous, ce qu'on a fait, c'est qu'on a contacté Global en leur disant qu'on a besoin d'infos sur le dossier d'un marchand, qu'il y a une émission de télé qui est sur ce dossier et qu'on aimerait avoir des infos pour être en mesure de donner l'heure juste. »

Quarante-huit heures plus tard, le dossier est réglé. Le commerçant obtient les crédits des débits totalisant 4940,41 $. L'après-midi même, La Facture obtient une entrevue au téléphone avec un haut dirigeant de Global Payment, dont le siège social est basé à Atlanta. Selon l'entreprise américaine, il y a eu une erreur dans l'entrée de données informatiques qui a provoqué une confusion entre le compte du commerçant et celui d'un autre marchand. Global Payment affirme que l'enquête était sur le point d'aboutir, que l'intervention de La Facture et les pressions de la banque n'ont fait qu'accélérer les choses.

Global Payment, qui dispose d'un bureau à Montréal, a refusé d'accorder à La Facture une entrevue filmée. Elle nous a fait parvenir une lettre dans laquelle elle admet avoir tardé à faire les recherches nécessaires et qu'elle assume l'entière responsabilité des difficultés éprouvées par le commerçant d'Outremont. Cet amoureux des oiseaux croit qu'il paiera le prix de cette erreur informatique pendant encore plusieurs années. « Ça ne se réglera jamais parce que le mal a déjà été fait. »

La Banque Nationale n'est pas la seule à avoir confié la gestion des systèmes de paiement électronique à une entreprise indépendante. La majorité des grandes institutions financières canadiennes l'ont fait. Si vous êtes commerçant et que vous avez des ennuis avec la compagnie qui gère les paiements électroniques, n'hésitez pas à faire pression sur votre banque. C'est avec elle que vous faites d'abord affaire.




 

 

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