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Émission
242 |
Le
mardi 11 mars 2003
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Il y a un an et
demi, une Marocaine décide de venir passer des vacances à
Montréal. Une fois ici, elle prend racine. Elle veut obtenir
le statut d'immigrante, mais tout s'effondre. Un jour, elle consulte
un centre d'aide aux immigrants, qui la dirige vers une avocate. Jusque-là,
il n'y a rien dans le dossier de cette avocate qui permettait d'avoir
des doutes sur son comportement. Aujourd'hui, cette ressortissante marocaine
en paye le prix.
Un
parrainage raté
« À
la suite de la mort de mon mari, je suis venue au Canada pour trouver
une paix morale et un équilibre. Le grand ami de mon frère,
décédé deux ans plus tôt, m'a été
d'un soutien moral incroyable. Nous avons décidé de nous
marier pour [
] reconstituer une famille. Ce qui m'est arrivé
au Canada est féerique. »
Ces
lignes ont été écrites il y a un an et demi. Trois
semaines après être entrée au pays comme touriste,
elle avait épousé un citoyen canadien d'origine marocaine.
Une demande de parrainage était en cours. Cette ressortissante
marocaine et sa fille ont été heureuses avec cet homme
qui leur offrait une vie nouvelle. Mais le conte de fées a duré
moins d'une année. Sur fond d'insécurité financière,
la relation du couple s'envenime. La dame fait venir toutes ses économies
du Maroc, soit près de 28 000 $.
Après
neuf mois de mariage, alors que madame n'a plus un sou, elle reçoit
une lettre d'avocat qui la jette par terre. Son mari demande la séparation
invoquant leur incompatibilité. Il a décidé d'annuler
sa demande de parrainage. « Lorsque j'ai reçu
cette lettre, je vais vous dire, je tremblais de la tête aux pieds
parce que je suis seule au Canada, je ne connais personne. »
Heureusement,
une dame accepte d'héberger cette ressortissante marocaine
le temps qu'elle trouve de l'aide auprès des organismes d'aide
aux immigrants. Elle se rend à la Maison internationale de
la Rive-Sud, et c'est de là qu'on l'a guidée vers une
avocate.
Une
avocate prend le dossier en main
« Elle
me propose un statut de réfugiée. Alors, j'étais
dans tous mes états, mais j'avais encore toute ma tête,
je dis : "Écoutez! Mon pays n'est pas en guerre". »
L'avocate lui
offre comme alternative les considérations humanitaires. Lors
du dépôt de la demande de parrainage, cette dame avait
soumis une demande de considérations humanitaires en tant que
conjointe d'un citoyen canadien. Cette demande lui permettait de rester
au Canada pendant l'étude de son dossier. Parce que la demande
de parrainage est annulée, l'avocate affirme qu'il faut déposer
une nouvelle demande, cette fois-ci en tant que personne indépendante.
« Elle
m'a dit que c'était 600 $ et qu'elle allait remplir le
formulaire, faire les photocopies et tout ça. »
Au total, cette
Marocaine remet 1345 $ à l'avocate, sans exiger de reçu.
Elle affirme qu'elle avait totalement confiance en son avocate. Le
temps passe et madame n'a pas de nouvelles. Son avocate lui dit que
la demande suit son cours. Inquiète, elle exige des preuves,
des reçus, et l'avocate se défile en appels non retournés
et en rendez-vous manqués.
L'avocate
finit par remettre à la dame la photocopie d'un reçu
de 600 $ qu'elle présente comme la preuve que la nouvelle
demande de considérations humanitaires a été
envoyée au ministère de l'Immigration. La date inscrite
sur le reçu est le 4 mars 2002. La dame affirme qu'elle ne
faisait pas affaire avec l'avocate le 4 mars 2002. Elle l'a rencontrée
seulement le 3 juin 2002.
La ressortissante
marocaine téléphone à l'Immigration. Une préposée
lui indique qu'il n'y a pas de nouvelle demande au dossier. Il n'y
a aucune trace d'une démarche effectuée par une avocate
en son nom.
« J'ai
dit : "Mais ce n'est pas possible!" Je tremblais,
je vous assure. Et on me dit : "Mais madame, voyez avec
votre avocate parce que pour nous, c'est clair qu'il n'y a rien."
Là, je l'ai appelée : Il y a vraiment quelque
chose qui ne va pas, l'Immigration est formelle, il n'y a pas de
dossiers de considérations humanitaires, il y a deux agents
qui me l'ont confirmé. »
La
Facture a tenté, sans succès, de joindre l'avocate
au téléphone. À son bureau de Longueuil, La
Facture apprend que cette avocate vient d'être évincée
de son bureau pour avoir fait des chèques de loyer sans provisions.
De plus, elle a démissionné du Barreau quelques jours
plus tôt. Elle n'est plus avocate. La Maison internationale
de la Rive-Sud informe l'équipe de La Facture qu'à
la suite de plaintes, elle ne dirige plus de clients vers cette avocate
depuis six mois.
La ressortissante
marocaine a versé 1345 $ à l'avocate alors qu'à
peu près rien n'a été fait. Le seul élément
nouveau dans le dossier a été le retrait du parrainage.
Il n'y a eu aucune information nouvelle ou nouvelle demande au dossier
depuis octobre 2001. Il y a pourtant ce fameux reçu, remis
à madame par l'avocate.
Selon
Robert Gervais, de Citoyenneté et Immigration Canada, ce reçu
a été fait pour un autre client, il n'a pas été
émis au nom de la ressortissante marocaine. L'avocate a remis
un reçu bidon à sa cliente mais, de plus, elle l'a mal
conseillée.
Robert Gervais
précise qu'il n'était pas nécessaire de payer
une deuxième fois. Il fallait d'abord se prononcer sur la première
demande. La citoyenne marocaine aurait pu, tout simplement, envoyer
une lettre à Immigration Canada exposant les faits nouveaux
en vertu desquels elle demandait, désormais, de rester au pays
pour des raisons humanitaires.
Mais
cette dame avait-elle des chances de rester au pays pour des raisons
humanitaires?
Non. Selon Immigration
Canada, il y a peu de chance qu'elle soit admise pour des raisons
humanitaires. « Madame a été admise
comme visiteur touriste. Maintenant, elle choisit de demeurer ici
et c'est un choix qu'elle doit assumer, avec la possibilité
qu'on constate qu'il n'y a pas vraiment de considérations
humanitaires dans son cas. »
Me
Patrice Brunet est président de l'Association des avocats en
droit de l'immigration. Une association dont l'avocate de la ressortissante
marocaine n'a jamais fait partie. Selon lui, il aurait fallu dès
le départ suggérer à madame d'obtenir une offre
d'emploi et un permis de travail afin de déposer une véritable
demande d'immigration. « C'est certainement une piste
de solution qu'elle doit exploiter dès que possible, parce
qu'un permis de travail, ça s'obtient assez rapidement. On
parle de deux à trois mois maximum. Ça risque d'être
sa meilleure porte d'entrée au Canada. »
Voilà ce
que son avocate aurait dû lui dire dès le mois de juin.
Les
recours
Même si
l'avocate ne pratique plus, la ressortissante marocaine peut déposer
une plainte au Barreau et, si la plainte est retenue, l'avocate sera
traduite devant le Conseil de discipline de l'organisme et la ressortissante
marocaine aura des chances de récupérer une partie,
si ce n'est tout son argent.
Pour ce qui est
de pouvoir rester au Québec, la seule chance de madame, c'est
d'obtenir au plus vite une offre d'emploi, idéalement reliée
à son domaine : l'enseignement.
Hyperlien
pertinent :
Citoyenneté
et Immigration Canada
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