David
contre Goliath
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« Je
ne pensais jamais que ça me coûterait [aussi cher]
d'électricité ! »
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Jacques Desaulniers
calcule que cela fait 17 ans qu'il verse en moyenne à Hydro-Québec
120 $ de trop pour chacune de ses factures d'électricité.
Jacques Desaulniers s'est aperçu que, depuis 1985, Hydro-Québec
lui facturait son électricité à un tarif beaucoup
trop élevé. Il s'est alors engagé dans une longue
bataille contre la société d'État pour être
remboursé.
Tout commence en 1985, quand un vieil entrepôt est converti
en immeuble à logements par M. Desaulniers. Jacques Desaulniers
loue ses quatre logements, électricité et chauffage
compris. M. Desaulniers trouve les premières factures d'Hydro-Québec
salées : « Je pensais vraiment qu'il
y avait quelque chose qui n'allait pas parce que je trouvais que ça
coûtait cher, pour quatre petits logements ».
M.
Desaulniers a appelé Hydro-Québec pour savoir s'il était
normal de payer ce prix-là. On lui a alors demandé la
dimension de ses appartements et, à la lumière de cette
information, Hydro-Québec a confirmé les coûts.
Jacques Desaulniers fait tout ce qu'il peut pour économiser
l'électricité. Il demande même la collaboration
de ses locataires. Jacques Desaulniers décide de contacter
de nouveau Hydro-Québec lorsqu'il reçoit un compte de
plus de 1100 $, pour deux mois de consommation d'électricité,
pour ses quatre logements. Rien n'y fait. Pendant 17 ans, les factures
d'électricité sont toutes plus exorbitantes les unes
que les autres. Ce n'est que le printemps dernier qu'un ami fait enfin
la lumière sur ses mystérieuses factures d'électricité.
Tarif
général ou tarif domestique ?
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C'est un ami de
M. Desaulniers qui lui a fait réaliser qu'il payait trop d'électricité,
qu'il payait en fait le tarif général. Sur les premières
factures de M. Desaulniers, il y a le code G1. Dans le jargon d'Hydro-Québec,
G1 signifie « tarif général ».
M. Desaulniers ne savait pas, à l'époque, ce que signifiait
ce code. Le tarif général n'est pas le tarif que tout
le monde paie. Il s'agit d'un taux qui est réservé aux
petites entreprises. Il est beaucoup plus élevé que
le tarif résidentiel. Dans le cas de M. Desaulniers, le tarif
général (G1) a gonflé ses factures de 21 %
par rapport au tarif domestique (D), le tarif résidentiel qu'il
aurait dû payer.
Selon
Hydro-Québec, les codes G1 ou D sont employés depuis
toujours et la société d'État les utilise dans
toutes ses communications, en publicité ou directement avec
sa clientèle. Nicolas Carette, porte-parole d'Hydro-Québec,
croit que les clients d'Hydro connaissent la signification du D ou
du G1.
Ronald O'Neary, conseiller à l'Association coopérative
d'économie familiale du nord de Montréal, a l'habitude
d'aider les consommateurs aux prises avec Hydro-Québec. « Pour
le commun des mortels, c'est à peu près incompréhensible.
Il devrait y avoir un vocabulaire beaucoup plus clair sur les factures
pour que les gens puissent les comprendre. »
En
juin dernier, dès que M. Desaulniers s'aperçoit de l'erreur,
il demande à Hydro-Québec d'être remboursé.
« Hydro-Québec a répondu : On
va aller deux mois en arrière. Franchement, deux mois,
pour me rembourser ? Deux mois, ça n'a pas d'allure !
Un employé d'Hydro-Québec m'a rappelé deux jours
après en me disant que la société d'État
pouvait remonter jusqu'en 1995. »
En
août dernier, Hydro-Québec envoie à M. Desaulniers
un chèque de 5471 $. Hydro lui rembourse ainsi sept années
seulement, au lieu des 17 au cours desquelles il a payé en
trop. Pour Jacques Desaulniers, il est clair qu'avec ce chèque,
Hydro souhaite clore son dossier. M. Desaulniers décide de
ne pas encaisser le chèque parce qu'il considère qu'Hydro-Québec
lui doit encore de l'argent. M. O'Neary est d'avis que, normalement,
Hydro-Québec devrait rembourser la totalité des sommes
parce que ce n'est pas de l'argent auquel la société
d'État avait droit, de l'argent qui lui était dû.
Immeuble
résidentiel ou commercial ?
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Selon Hydro-Québec,
si la société d'État n'a pas remboursé
au complet M. Desaulniers, c'est parce qu'il lui manquait les preuves
que l'entrepôt avait été transformé en
logements dès 1985.
M. Carette affirme
que les clients ont la responsabilité d'informer Hydro-Québec
des transformations qui sont faites à un immeuble. « Ce
n'est pas à Hydro-Québec d'aller constater que M. Desaulniers
avait transformé son immeuble. Est-ce que l'erreur émane
de lui, du moins de l'électricien qu'il avait embauché
à l'époque, ou à Hydro-Québec ? Personne
ne le saura jamais. »
En fait, il revient
à l'électricien d'informer Hydro-Québec de la
vocation d'un immeuble. Chaque fois qu'il installe une boîte
électrique, l'électricien doit inscrire dans un formulaire
s'il s'agit d'un immeuble résidentiel ou commercial.
Jacques Desaulniers
fait parvenir à Hydro-Québec le permis de construction
qui prouve la vocation résidentielle du bâtiment depuis
1985. Malgré ce papier, le remboursement d'Hydro-Québec
se fait toujours attendre. Jacques Desaulniers est déterminé
à se faire rembourser en entier. Il communique de nouveau avec
Hydro-Québec, le fait à plusieurs reprises, mais en
vain.
À la fin
du mois de novembre, M. Desaulniers appelle l'équipe de La
Facture. Hydro-Québec semble alors relancer le dossier.
M.
Carette affirme que le dossier n'est jamais « tombé
mort ». Si une erreur a été commise, selon
lui, c'est de ne pas avoir contacté M. Desaulniers, mais le
dossier n'a jamais été considéré comme
réglé. Jacques
Desaulniers estime qu'Hydro-Québec lui doit encore 10 000 $.
Les six mois d'acharnement de Jacques Desaulniers ont valu la peine.
Il a reçu, quelques jours après Noël, un second
chèque de plus de 14 000 $. « Hydro-Québec
m'a remis un chèque de 14 134 $. Que je suis bien
content d'avoir ramassé ! De toute façon, c'est
ce que la société d'État me devait. »
C'est au total
près de 20 000 $, incluant les intérêts,
que Jacques Desaulniers a récupérés.
En
conclusion
Depuis
le printemps dernier, pour chaque nouveau branchement ou rebranchement,
Hydro-Québec envoie un formulaire qui contient tous les détails
de votre abonnement. Avec ce document, vous pouvez vérifier
si toutes les données concernant votre abonnement sont exactes.
D'autre part, faites attention ! Hydro-Québec veut désormais
limiter à trois ans tous les remboursements liés à
des erreurs de facturation. La
société d'État en a fait la demande auprès
de la Régie de l'énergie, qui doit rendre sa décision
dans quelques semaines.
Donc, si Hydro-Québec
vous doit de l'argent, hâtez-vous de demander votre remboursement !