Émission 214

Le mardi 26 février 2002


Vol d'identité : le cauchemar de Réjean Dallaire

Une enquête de La Facture

 


Le 25 janvier dernier, la Police provinciale de l'Ontario arrêtait un résidant de Pointe au Baril, un petit village près de Sudbury. Depuis près de 14 ans, cet homme vivait en Ontario sous le nom de Réjean Dallaire, une identité qu'il avait volée à un citoyen de Mascouche, au Québec.

Ce n'est que récemment que Réjean Dallaire s'est aperçu que quelqu'un usurpait son identité.

La Facture a enquêté.


De surprise en surprise

En juin 2001, Réjean Dallaire constate que quelque chose ne va pas quand lui parvient un avis de cotisation de Revenu Canada pour l'année 2000.

À sa grande surprise, la somme de
20 539 $ apparaît sur l'avis, pour des indemnités d'accidenté du travail versées par l'Ontario.

M. Dallaire n'a jamais travaillé ni résidé dans cette province.

Il téléphone à Revenu Canada.



À son grand étonnement, M. Dallaire apprend que le ministère a reçu l'avis de cotisation du Workplace Safety and Insurance Board, la WSIB, l'équivalent ontarien de la CSST, et que l'avis porte son numéro d'assurance sociale (NAS).

Au WSIB, on lui dit que les renseignements contenus dans le dossier sont confidentiels.

Puis, on le renvoit à Développement des ressources humaines Canada (DRSC), puisqu'il a un problème avec son NAS.


Une lettre de trop

Le ministère fédéral lui suggère de faire venir son dossier de crédit Équifax, qu'il obtient le 10 septembre 2001.

Il découvre alors que :
• le dossier est établi au nom de Réjean J. Dallaire. Or, il n'a jamais utilisé l'initale J pour s'identifier;
• le dossier porte une adresse à Pointe au Baril Station, en Ontario.
• trois cartes de crédit sont inscrites dans le dossier, avec plus de 20 000 $ à payer.

M. Dallaire ne se reconnaît pas dans ce dossier.


Des éléments pour porter plainte

La Facture a obtenu copie des formulaires de demande pour les cartes de crédit. Chaque fois, la signature n'est pas celle de Réjean Dallaire.


Ces formulaires révèlent autre chose : le demandeur utilise non seulement le nom et le NAS de M. Dallaire, mais aussi sa date de naissance.

Réjean Dallaire rappelle chez Équifax le jour même pour l'aviser des nombreuses erreurs que comporte «son» dossier.

On le rassure en lui disant qu'il recevra un dossier corrigé dans les 15 jours.

Le 17 septembre, il rencontre un enquêteur de Développement des ressources humaines Canada.

Il doit prouver qu'il est le véritable Réjean Dallaire en fournissant de nombreux documents.

Le jour même il dépose une plainte à la police de Mascouche.

Mais «le problème, comme le souligne le directeur-adjoint du corps policier, Michel Thériault, c'est que ça se passe en Ontario. On ne sait pas où débute l'infraction. La personne qui a obtenu les informations sur l'identité de M. Dallaire, les a-t-elle obtenues au Québec ou en Ontario?»


Une faillite sur les bras

Deux mois plus tard, le 23 novembre, Réjean Dallaire s'enquiert des modifications apportées à son dossier de crédit chez Équifax.

Stupéfait, il apprend que son homonyme ontarien a déclaré faillite.

De plus, aucun changement n'a été apporté à son dossier.

Cette déclaration de faillite l'inquiète.

Il craint de voir ses biens saisis et d'être contraint de payer les dettes de l'autre.


Combien y a-t-il de Réjean Dallaire?

La Facture se rend rencontrer le chef régional des enquêtes majeures de Développement des ressources humaines Canada, Jean-Paul Desjardins, pour savoir s'il est possible que deux Réjean Dallaire aient le même numéro d'assurance sociale.

Il explique : «Nous avons fait des recherches avec le fichier central à Bathurst (au Nouveau-Brunswick) et il y a un M. Dallaire, c'est celui du Québec. Celui de l'Ontario n'est pas enregistré comme tel.»

En janvier dernier, comme le vol d'identité semble avoir été commis à Pointe au Baril, le ministère fédéral remet l'enquête entre les mains de la Police provinciale de l'Ontario.

L'enquête n'étant pas alors terminée, la Police refuse de répondre aux questions de la Facture.


La Facture sur les traces du faussaire

Alors, La Facture se rend à Pointe au Baril.



Lorsqu'elle se présente chez l'homme qui se fait appeler Réjean Dallaire, il est absent : une femme précise qu'il est à la pêche.

Sur le conseil de la femme, La Facture lui téléphone en soirée.

L'homme refuse d'accorder une entrevue à la caméra mais accepte de parler au téléphone.

Selon lui, il a perdu son portefeuille dans la région de Montréal, 12 ans plus tôt.

Il a, par la suite, dit-il, demandé une nouvelle carte d'assurance sociale au bureau de DRHC à Toronto.

Interrogé sur les similitudes existant Réjean Dallaire de Mascouche et entre lui, le résidant de Pointe au Baril prétend ne pas le connaître et affirme que le gouvernement lui a attribué par erreur le NAS du Mascoutain.

Mais Jean-Paul Desjardins, de DRHC, est formel : il n'y a eu aucun renouvellement de carte d'assurance sociale au nom de Réjean Dallaire portant le numéro du résidant de Mascouche.

Il ajoute : «Peut-être que le monsieur en Ontario ne s'appelle pas du tout Dallaire, mais compte tenu qu'il connaissait quelqu'un de ce nom au Québec, il s'en est servi pour son usage personnel.»


La véritable identité de Réjean J. Dallaire

On a appris, depuis, que Réjean J. Dallaire, de Pointe au Baril, s'appelle en fait Gérard Morrissette.

Le lendemain de la visite de La Facture chez lui, soit le 25 janvier 2002, la police ontarienne l'arrête et le remet à la Sûreté du Québec.



Gérard Morrissette se retrouve en cour où il est accusé de deux meurtres commis en 1987, à Côteau-du-Lac, près de Valleyfield.





Comment a-t-il pu voler
l'identité de Réjean Dallaire?


Ce qui est étonnant dans cette histoire, c'est que la police a pu mettre la main au collet de Gérard Morrissette grâce à Réjean Dallaire, qui le connaissait.

Quand ils étaient jeunes, l'accusé et le frère de M. Dallaire étaient des amis.

Trahi par sa connaissance de la famille Dallaire

La Facture a demandé à Jean-Paul Desjardins, directeur des enquêtes majeures chez DRHC, comment on avait fait le lien entre Réjean J. Dallaire, résidant de Pointe au Baril, et Gérard Morrissette.

«Étant donné qu'il connaissait bien la famille (Dallaire), il était en mesure d'énumérer le nom des différentes personnes de cette famille-là.» De là est né un doute, dit M. Desjardins.

Et il a demandé à un enquêteur du Québec de consulter M. Dallaire.

Ce dernier a réuni sa famille et ils se sont posé la question : qui connaît assez bien la famille pour pouvoir énumérer ses membres et usurper l'identité de M. Dallaire?

C'est ainsi qu'on a identifié Gérard Morrissette.


De l'accès au fichier des NAS

Mais cela n'explique pas comment l'homme a pu se procurer le NAS de Réjean Dallaire.

M. Desjardins émet l'hypothèse suivante: en 1998, comme le fichier central était plus ouvert au public, Gérard Morrissette a pu téléphoner au fichier et s'identifier grâce au nom de la mère et à la date de naissance de M. Dallaire.

Ensuite, poursuit M. Desjardins, il n'a eu qu'à dire qu'il avait perdu son NAS et demander qu'on le lui rappelle.

Après quoi, il s'est procuré un certificat de naissance au nom de Réjean Dallaire. Jean-Paul Desjardins poursuit l'analyse : «Avec un certificat de naissance, vous pouvez obtenir un renouvellement de carte d'assurance sociale et obtenir un permis de conduire. Ça veut dire que M. Morrissette se promenait avec un permis de conduire au nom de Dallaire, mais avec sa photo à lui.»


Comment a-t-on pu ne pas le retracer avant?

Pour Réjean Dallaire, il est illogique que deux hommes aient utilisé pendant plus de 10 ans le même nom, la même date de naissance et le même NAS, sans que personne ne s'en aperçoive.

Jean-Paul Desjardins a une explication : «C'est parce qu'il n'utilisait pas nécessairement cette identité-là pour travailler. S'il l'avait fait, il aurait eu des revenus d'emploi, des T-4 auraient été émis et, à ce moment-là, des comparaisons auraient pu se faire au niveau de l'impôt. Et nous en aurions été avisés.»

Effectivement, Gérard Morrissette se déclarait travailleur autonome.

C'est précisément parce qu'il a utilisé l'identité de Réjean Dallaire pour travailler en 1999 qu'il a finalement été démasqué.

Alors qu'il était camionneur pour une compagnie de Cambridge, il a eu deux accidents en moins de deux mois.

Ce qui a entraîné le versement d'indemnités d'accidenté du travail. Et, finalement, l'émission du formulaire qui a causé sa perte.


Et l'avenir?

Même si Gérard Morrissette est sous les verrous, Réjean Dallaire est inquiet : «Je ne connais pas toutes les implications de ce qui a été fait avec mon nom et je me demande si l'avenir ne me réserve pas des surprises.»

Depuis janvier, plusieurs correctifs ont été apportés pour que Réjean Dallaire, résidant de Mascouche, retrouve son identité :
• Développement des ressources humaines Canada a offert à M. Dallaire de changer son numéro d'assurance sociale.
• Équifax a fait le ménage de son dossier de crédit, en spécifiant qu'il avait été victime de fraude.
• la Cour ontarienne doit se prononcer bientôt pour que M. Dallaire soit dissocié de la faillite de Réjean J. Dallaire, le faux.


Hyperliens pertinents

La Sûreté du Québec


La Police provinciale de l'Ontario

 

 




Ouvrez l'oeil sur le cinémomètre

 

Le 15 décembre 2001, monsieur Ouellet, de Sainte-Foy, reçoit une contravention pour avoir roulé à 135 kilomètres à l'heure sur une autoroute.

Monsieur Ouellet prétend, lui, qu'il ne roulait qu'à 108 kilomètres à l'heure.

Lorsqu'il a demandé au policier de lui montrer la vitesse inscrite sur le cadran du radar, l'agent lui a répondu que cela était impossible.

La Facture a voulu savoir pourquoi.


La Facture teste le cinémomètre

Avec la collaboration de la Sûreté du Québec, l'animateur de l'émission a testé le système.

Il est intercepté alors qu'il roule à 107 kilomètres à l'heure sur une autoroute, soit sept kilomètres de plus que la vitesse permise.

Le policier lui annonce qu'il roulait à … 107 kilomètres.



Une opération d'interception

Il faut savoir qu'une opération d'interception se fait avec deux véhicules.

Le premier, le véhicule opérateur, est muni du cinémomètre qui enregistre la vitesse des véhicules sur la route.

Le second, le véhicule intercepteur, est situé à 150 ou 200 mètres du premier et est relié avec lui par radio.

Le policier dans le premier véhicule lit la vitesse et passe l'ordre d'interception au second, s'il y a lieu.

En plus de l'interdiction et du danger de circuler à pied sur une autoroute, il y a une autre raison pour laquelle le policier ne peut pas montrer à l'automobiliste intercepté la vitesse affichée sur le cinémomètre.

Lorsqu'une voiture sort du faisceau du radar, sa vitesse disparaît de l'afficheur pour laisser place à l'affichage de la vitesse d'un autre véhicule.


La fiabilité du cinémomètre

Mais cet appareil est-il fiable?

Le caporal Robert Jauvin, instructeur chef en sécurité routière à la Sûreté du Québec, répond : «Les appareils d'aujourd'hui sont des microprocesseurs.»

Selon lui, la croyance voulant que des éléments extérieurs faussent la lecture n'a plus cours.

«L'appareil est ultraprécis, ajoute-t-il. L'écart de précision est d'environ un kilomètre à l'heure.»

Mais qu'en est-il de la situation quand un poids-lourd dépasse une voiture ?

Le caporal Jauvin précise : «L'opérateur voit très bien la vitesse des deux véhicules. Il sait exactement quel véhicule va à quelle vitesse. Et l'intercepteur intercepte le bon véhicule.»


Peut-on contester une contravention?

Quand un automobiliste se fait coller une contravention pour excès de vitesse, peut-il la contester en cour?

Le porte-parole de l'Association pour la protection des automobilistes, Marc Migneault, répond par l'affirmative : «C'est possible de contester une contravention pour excès de vitesse. La poursuite doit établir que le policier était qualifié pour faire le travail; que le cinémomètre a été calibré avant et après; et que c'était un instrument fiable.»


Marc Migneault ajoute : «On peut tenter de soulever un doute raisonnable dans l'esprit du juge. On peut, par exemple, avouer une infraction pour une vitesse plus faible, et là, il y a certaines chances pour que le juge accepte que vous rouliez à une vitesse excessive, mais pas à celle constatée par le radariste.»


Est-ce payant de contester une contravention?

Même si un automobiliste est certain de pouvoir semer le doute dans l'esprit d'un juge, il devrait y penser deux fois avant de contester sa contravention.

Car, s'il réussit à faire réduire son amende en démontrant, par exemple, qu'il roulait à 118 et non à 128 kilomètres à l'heure, il pourrait devoir acquitter des frais de cour qui coûteront plus cher que la réduction de l'amende.

Cependant, certains conducteurs peuvent contester une contravention pour ne pas perdre les derniers points d'inaptitude qu'il leur reste.

Le meilleur conseil qu'on puisse donner, c'est de respecter les limites de vitesse permises.

 

Hyperlien pertinent

La Sûreté du Québec

 


 

 

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