Un
couple est forcé
de rester en Égypte contre son gré
Dans
les jours qui ont suivi les attentats du 11 septembre aux États-Unis,
des milliers de voyageurs ont été cloués au sol, à l'étranger, incapables
de rentrer chez eux à la date prévue.
Plusieurs
ont assumé des dépenses importantes supplémentaires. Comme ce fut le
cas d'un couple de Montréal.
Comment faire pour rentrer?
Ce couple, qui était en Égypte, devait rentrer le 14 septembre.
Mais,
à la suite des attentats, EgyptAir annule leur vol de retour.
Le couple est alors pris en charge par le représentant égyptien du grossiste
montréalais qui a organisé son voyage.
Il réussit à trouver des billets de retour pour le 18 septembre, mais
avec un autre transporteur aérien, KLM.
Toutefois, le bureau d'EgyptAir à Montréal s'engage à transférer gratuitement
leurs billets à la compagnie hollandaise.
Un fax qui n'arrive pas à destination
Son
directeur dit avoir envoyé un fax au bureau d'EgyptAir au Caire pour
autoriser ce transfert.
Mais la télécopie ne parvient pas à destination.
Aussi, le représentant égyptien du grossiste montréalais annonce au
couple qu'il n'y a pas d'entente entre EgyptAir et KLM.
Le
dilemme
Il offre alors aux voyageurs une alternative : soit rentrer sur les
ailes de KLM, soit attendre le prochain vol d'EgyptAir, quelques jours
plus tard.
Mais,
l'avion de la compagnie égyptienne atterrit à New York, et non pas à
Montréal.
Selon le couple, le trajet New York-Montréal relevait de son entière
responsabilité.
Il décide donc de suivre la recommandation du représentant du grossiste
et de prendre le vol de KLM.
Coût des billets : 2255,74 $ US.
De retour à Montréal, le couple réclame des dommages à EgyptAir. La
facture s'élève à près de 5000 $, incluant le prix des billets d'avion
et le remboursement des frais d'hôtel et de subsistance.
Un
cas de force majeure
Mais, comme leur problème a été causé par un cas de «force majeure»,
la situation se complique.
Selon Éric Fraser, un spécialiste du droit de la consommation,
un consommateur ne peut obtenir de dédommagements pour les frais d'hôtel
et de subsistance encourus à la suite d'un cas de force majeure.
Est-ce à dire que notre couple n'a aucun recours?
Maître Fraser explique que non : «On a quand même un consommateur
qui a payé pour un billet de retour. Donc, à partir du moment où il
n'y avait plus de force majeure, le transporteur était dans l'obligation
de fournir le service.»
L'obligation du transporteur
Mais pas n'importe quel service : dans le cas présent, EgyptAir était
tenu d'offrir un vol à destination de Montréal, et non pas de New York.
Mais EgyptAir se défend en affirmant qu'elle aurait ramené le couple
à Montréal, via un autre transporteur.
Cette
information, selon le couple, ne lui est jamais parvenue au Caire.
Ce qui, selon Éric Fraser, justifie le couple d'avoir cherché un billet
pour Montréal : «Lorsqu'on vous donne une offre qui n'est qu'une
moitié ou 75% de trajet, c'est inacceptable. Son obligation (au transporteur
aérien), c'est Le Caire-Montréal. Selon moi, il était d'autant plus
légitime à ce moment-là de faire une recherche pour obtenir un billet
Le Caire-Montréal via un autre transporteur.»
Et
il conclut que le couple a droit à un remboursement.
Le grossiste refuse de rembourser le couple...
Mais le grossiste reproche au couple le coût élevé de ses billets de
retour. Il refuse de s'expliquer à La Facture, mais fait connaître
sa position par le biais de l'Association des grossistes.
Selon M. Bernard Beauchamp, le couple a pris une très mauvaise
décision en achetant des billets en classe affaires, parce qu'il n'y
avait plus de places en classe économique sur le vol de KLM.
Maître Fraser reconnaît qu'on pourrait effectivement le lui reprocher
en droit, à moins qu'il n'ait fait des tentatives pour trouver des billets
moins coûteux.
Ce à quoi le couple répond que les billets de retour lui ont été imposés
par le représentant égyptien du grossiste montréalais.
...mais
pas EgyptAir
Le grossiste répond que le couple aurait dû téléphoner à Montréal,
et refuse de le dédommager.
Ce qui n'est pas le cas d'EgyptAir qui lui offre des billets pour une
destination de son choix au Proche-Orient, à valoir cette année.
Bernard Beauchamp, de l'Association des grossistes, est d'accord : «Est-ce
que c'est une compensation juste et équitable? À mon avis, oui.»
Ce n'est pas l'avis du couple qui veut un remboursement en argent.
Et maître Fraser estime qu'il est en droit de demander ce remboursement.
Le geste d'EgyptAir
À
la fin de l'entrevue, EgyptAir s'engage à rembourser le couple.
Toutefois, un mois plus tard, le transporteur aérien trouve la facture
salée.
Il ne veut pas rembourser le plein montant des billets qui ont coûté
3600 $ canadiens, et propose au couple un dédommagement de 1500 $.
Un
petit conseil : dans un cas pareil, ne vous fiez pas uniquement
au représentant du grossiste. Faites affaire avec l'agent de voyage
qui vous a vendu le forfait.
Détournement
de REÉR
C'est
le temps des REÉR, le temps d'économiser pour la retraite.
Cet argent est disponible en tout temps pour son propriétaire à condition
qu'il paye les impôts sur le retrait.
Or, des promoteurs font miroiter aux personnes intéressées la possibilité
d'encaisser une partie de leur REÉR sans payer d'impôts.
Un cas venu du Lac-Saint-Jean
Un
courtier du Lac-Saint-Jean, Jacques Petitclerc, a alerté La
Facture après avoir perdu un de ses clients.
Il y a quelques mois, le client de Jacques Petitclerc avait besoin
d'argent.
Quelqu'un lui a suggéré d'utiliser les économies faites en prévision
de sa retraite.
Il pouvait, lui assurait-on, récupérer une partie de ses REÉR d'environ
50 000 $ sans payer d'impôts.
Les petites annonces
Cette pratique est connue de la Commission des valeurs mobilières
du Québec qui la dénonce.
Selon
Jean Lorrain, de la CVMQ, les promoteurs de cette pratique recrutent
leurs «clients» dans les hebdos locaux.
La
Facture a décidé de répondre à une petite annonce parue dans un
quotidien.
Un homme de Chicoutimi prend l'appel et propose à notre journaliste
d'acheter son CRI (Compte de retraite immobilisé) à 70 % de sa valeur.
La transaction, précise-t-il, se fera en trois ou quatre semaines.
Un promoteur peu loquace
La Facture se rend le rencontrer à Chicoutimi.
Confronté à la caméra, le promoteur se présente seulement comme un
agent de
liaison, incapable d'expliquer les détails de la transaction
Pourtant,
au téléphone, il était plus affirmatif : «Cet argent-là est
remis dans votre compte de banque personnel, à l'insue des gouvernements.
Alors si vous ne voulez pas le déclarer, libre à vous», disait-il.
Comment ça marche?
Le stratagème qui rend possible ce genre de pratique est simple. Dans
un premier temps, le promoteur transfère l'argent du REÉR de son client
dans un REÉR autogéré, grâce au formulaire T2033.
Ce
qui permet au client désormais de décider du type de placement qu'il
veut faire.
Ensuite, le promoteur, qui travaille avec une maison de courtage et
possiblement une fiducie, lui fait acheter des actions d'une société
mise sur pied dans le seul but de faire fonctionner toute l'opération.
Jean Lorrain, de la CVMQ, trace le portrait de ces entreprises: «Ce
sont des sociétés qui n'ont aucune activité financière ou industrielle.
Ce sont des coquilles… pour permettre un prêt aux investisseurs.»
Finalement une partie de l'argent de l'investisseur revient dans ses
poches, sous forme d'un prêt consenti grâce aux actions achetées dans
la compagnie bidon.
Libre de tout impôt? Non !
Mais, contrairement à ce que dit le promoteur, ce prêt est imposable.
Au Québec, c'est le ministère du Revenu qui administre ce dossier
à partir des règles édictées par Ottawa.
Manon Tremblay, agente d'information au ministère, est catégorique
: l'investisseur doit ajouter à sa déclaration de revenu la valeur
de son placement.
Pour
Jean Lorrain, ce type de «placement» n'est pas
avantageux pour l'investisseur : «Si le ministère du Revenu
vous rattrape vous allez être cotisé, vous allez peut-être même à
la rigueur être pénalisé. Qui plus est, vous avez laissé entre 15
et 30 % au promoteur. Donc, ultimement vous subissez une perte.»
La CVMQ prend des mesures
La Commission des valeurs mobilières du Québec a décidé de réagir.
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D'une part, elle prévient les victimes potentielles par le biais des
petites annonces.
D'autre part, elle met en garde les courtiers en valeurs mobilières
contre cette pratique.
La CVMQ a même prévenu les maisons de fiducie sur lesquelles elle
n'a pas de juridiction directe, des dangers de la pratique.
Une fiducie soucieuse de la loi
La
fiducie B2B Trust, une filiale de la Banque Laurentienne, détient
entre 30 et 40 % des parts du marché canadien des REÉR autogérés.
Son porte-parole précise que la fiducie vérifie les investissements
et quand elle soupçonne que l'argent retourne à l'investisseur, elle
interdit la transaction.
Le gouvernement a le bras long
Quant aux investisseurs qui croient tromper le ministère du Revenu,
qu'ils sachent que le gouvernement peut les retracer facilement, nous
dit Manon Tremblay : «C'est relativement simple dans le sens
où on reçoit les documents pertinents, et, lorsqu'on fait nos vérifications,
on est à même de vérifier si les règles ont été respectées.»
Il faut retenir que, lorqu'on retire de l'argent de son REÉR, on paie
de l'impôt. Mais, au moins, il n'est pas nécessaire de donner une
commission de 30% à un intermédiairre et on évite d'avoir les gouvernements
à nos trousses.