Comme
beaucoup d'autres,
elle tire le mauvais numéro
Une
enquête de la Facture
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Une incroyable
occasion d'affaire : tel était le titre d'une petite annonce publiée
dans les journaux en 1999, par une compagnie québécoise que nous appellerons
la «CLR», la Compagnie de la loterie russe.
La
publicité utilisait des arguments forts : «Pas d'employés, pas
d'inventaire, pas de loyer, pas d'administration…» pour inviter
les Québécois à devenir copropriétaires d'une loterie en Europe de l'Est.
En
février, le président de la «CLR» vantait sa loterie russe
devant les médias montréalais. Selon lui, les risques étaient minimes.
Il avait, disait-il, le soutien des forces de l'ordre et du système
bancaire russes. Il anticipait même des profits de l'ordre d'un milliard
de dollars.
Attirée par la promesse d'un gros profit
À
l'été 99, une Montréalaise entre en contact avec un représentant.
Après avoir lu la documentation, elle signe un contrat et devient la
propriétaire de la licence d'exploitation d'une valideuse de la loterie
à Saint-Pétersbourg, en Russie. Prix d'achat : 12 750 $.
En
retour, le contrat lui donne le droit de percevoir 5 % des revenus bruts
générés par la valideuse, pendant 10 ans.
L'annonce promettait un gain potentiel de
160 000 $.
La nouvelle propriétaire de la licence était prête à se satisfaire de
80 000 $ gagnés sur 10 ans.
Deux ans après, ses gains s'élèvent à 400 $. Que s'est-il passé?
Les débuts d'un fiasco
La
loterie est lancée officiellement le 10 décembre 1999, à Saint-Péterbourg.
Sont présents les joueurs clés du
projet : d'une part, le président-directeur général d'une entreprise
qui détient
75 % des parts de la «CLR»; d'autre part, deux Russes associés
à hauteur de 25% à la «CLR», propriétaire de la loterie.
Déjà, les bureaux de Saint-Pétersbourg comptent une cinquantaine d'employés,
dont un Québécois.
Il s'appelle
Normand Arsenault, un spécialiste en informatique et directeur
technique du projet.
Les choses se gâtent rapidement : selon M. Arsenault, de nombreux fournisseurs
ont rendu des services sans jamais être payés.
En tout, moins de 200 terminaux sont installés. Le projet initial en
prévoyait près de 500 la première année, et 2000 une fois l'opération
complétée.
Des propriétaires dans le noir
Tout au long de l'année 2000, les propriétaires québécois de licence
sont convoqués à des assemblées au cours desquelles le président de
la «CLR» impute une bonne part des déboires financiers de
la loterie à l'installateur de réseaux en Russie. Il l'accuse d'avoir
haussé indûment ses tarifs en cours de projet.
Rejoint
à Saint-Pétersbourg, le directeur du marketing de la compagnie de réseaux
nie ces allégations.
La
«CLR» est poursuivie par une dizaine de créanciers : elle
déclare faillite au printemps 2001.
Les valideuses sont saisies et, selon les informations obtenues par
La Facture, elles sont aujourd'hui mises en vente pour rembourser
les fournisseurs impayés.
L'inquiétude des propriétaires de licence
La
propriétaire montréalaise d'une licence de valideuse veut récupérer
son argent.
Elle est inquiète et elle n'est pas la seule.
350 Québécois ont injecté près de cinq millions de dollars dans ce projet.
Les partenaires québécois et russes refusent de les rembourser.
D'une part, les Russes déclinent toute responsabilité en soutenant que
les Québécois ne les ont jamais informés de la vente de licences à des
particuliers. Ils prétendent l'avoir appris par les journaux.
Ce
n'est pas le seul reproche qu'ils ont à faire aux Québécois : les Russes
les accusent d'avoir gonflé les factures en achetant des équipements
usagés et en les présentant au prix d'équipements neufs.
Pour sa part, le président de la «CLR» affirme que les propriétaires
de licence savaient qu'il y avait un risque et qu'il était très élevé.
Dans les faits, ni la documentation, ni la publicité, ni même le site
internet de sa compagnie ne mentionnent les risques élevés. Au contraire.
Portrait
d'un «aventurier»
Ce n'est pas la première fois que des consommateurs perdent
de l'argent en faisant confiance au président de la «CLR».
Au Palais de justice de Montréal, cet homme d'affaires a déjà plaidé
coupable à plus de 200 chefs d'accusation, portés en vertu de la loi
de protection des consommateurs.
En
1994, l'Office de la protection du consommateur le qualifiait même «d'aventurier
notoire». Sa spécialité d'alors, c'était l'ouverture et la fermeture
rapide de studios de santé. Il dut payer près de 90 000 $ en amendes
diverses.
L'explication du fiasco
À Saint-Pétersbourg, la «CLR» a nommé un ancien banquier
russe directeur général du projet.
Très
vite, Normand Arsenault perce son jeu : «En le regardant
travailler, j'avais la certitude qu'il tentait de saboter le projet.»
Le président de la «CLR» a évoqué devant M. Arsenault des
pertes de près d'un million de dollars en pots de vin. «Pourquoi,
se demande-t-il, n'a-t-il pas agi à ce moment-là?»
Dans
un document interne, la «CLR» reconnaît que non seulement
son directeur général à Saint-Pétersbourg sabote le projet mais aussi
que la compagnie en a presque perdu le contrôle.
Pendant ce temps, les investisseurs ignorent tout de la situation.
Les recours possibles des propriétaires
Quels sont les recours des propriétaires de licence d'une
valideuse de la loterie pour récupérer leur argent?
Au Québec, un organisme est chargé de réglementer les appels publics
à l'épargne et de protéger les investisseurs : la Commission des valeurs
mobilières du Québec (CVMQ).
Elle aurait dû obliger la «CLR» à émettre un prospectus.
Ce document aurait fourni aux investisseurs toutes les informations
pertinentes au projet de loterie, notamment une évaluation des risques.
Le président de la «CLR» soutient que les contrats de licence
étaient des contrats d'achat-location d'un appareil et, de ce fait,
ne relevaient pas de la juridiction de la CVMQ.
Dans un premier temps, la Commission des valeurs mobilières du Québec
se dit d'accord avec lui.
Toutefois, dans un deuxième temps, elle révise sa position.
Jean Lorrain, de la CVMQ, précise : «L'opération menée
par les sociétés a été modifiée un mois ou deux mois après l'intervention
de notre enquêteur. On est alors intervenu de nouveau pour dire qu'il
s'agissait de contrats d'investissement.»
Avec, pour conséquence, qu'en avril 2000, la Commission des valeurs
mobilières du Québec force la «CLR» à cesser toute sollicitation
et ouvre une enquête sur sa loterie.
Mais
il est déjà trop tard : près de 350 licences ont été vendues.
La leçon à tirer de cette aventure
Cette enquête dure depuis plus d'un an et il n'est pas certain que les
investisseurs pourront en bénéficier.
«Car la Commission, nous dit Jean Lorrain, n'a pas pour rôle d'aller
rechercher l'argent des investisseurs.»
Et il conclut : «Quand on vous offre un projet par voie de journaux,
déjà ça soulève des questions. Si on vous offre un rendement mirobolant,
soyez très prudents : en règle générale, c'est trop beau pour être vrai.»
La CVMQ n'a pas terminé son enquête. On ne sait donc pas si la «CLR»
a violé ou non la loi.
D'autres
promesses et une poursuite
Pendant ce temps, le président de la «CLR» maintient toujours
que la loterie n'est que suspendue. Il parle de la redémarrer sous une
autre appellation et promet des bénéfices aux investisseurs.
Entre
temps, la propriétaire montréalaise d'une valideuse n'accepte pas d'avoir
perdu 12 750 $ : elle poursuit les promoteurs du projet et leurs représentants.
Ouvrez l'oeil sur le bracelet minceur
Le désir de maigrir
fait grossir le portefeuille de bien des commerçants. Une compagnie
offre, dans une info-pub diffusée à la Boutique TVA, le bracelet «AcuOne»
qui permettrait de maigrir.
Pour
un peu plus de 100 $, la Facture s'est procuré un bracelet «AcuOne».
L'info-pub
insiste beaucoup sur les vertus des pointes en métal situées sur la
face interne du bracelet et qui fonctionneraient selon le principe
de l'acupuncture électronique.
Ces pointes appliquées sur l'intérieur du poignet droit toucheraient,
dit la publicité, les sept points d'acupuncture qui commandent l'appétit.
La
présidente de l'Ordre professionnel des acupuncteurs du Québec, Lise
Tousignant, affirme que ce bracelet n'est pas un instrument d'acupuncture
parce que ses petites pointes de métal ne transpercent pas la peau.
Elle ajoute qu'il n'existe pas de méridien qui contrôle à lui seul
l'appétit.
Ce qui existe, par contre, c'est le grand méridien de l'estomac.
Or,
ce dernier commence à l'œil et descend jusqu'aux orteils, en passant
par le cou, la poitrine, l'abdomen, la partie avant de la cuisse et
de la jambe.
Il n'y a donc pas de relation entre le poignet et l'estomac.
Les points d'acupuncture situés dans le poignet, dit Mme Tousigant,
sont en relation avec le cœur et aident à calmer une personne nerveuse,
par exemple.
Les
fabricant et vendeurs du bracelet minceur promettent de rembourser
dans les 30 jours les clients insatisfaits.
Une question
reste en suspens : 30 jours sont-ils suffisants pour vérifier si le
bracelet peut tenir ses promesses?
Alors
ouvrez l'oeil!