Émission 201

Le mardi 30 octobre 2001


Louer une auto pour 50 $ par mois : danger!

La vente pyramidale est interdite au Canada et l'exploitation d'un tel système est passible d'une forte amende ou même d'une peine d'emprisonnement. Mais ce n'est pas toujours facile de savoir si on est en présence de ce système.

Comment se qualifier pour avoir droit à une location

Un club originant de Québec, mais actif dans toutes le régions de la province, offre aux consommateurs de louer une voiture pour 50 $ par mois.

Voici comment fonctionne le club, selon les explications données par sa présidente, lors d'une séance d'information tenue à Saint-Georges-de-Beauce.

D'abord, il faut acheter une carte de membre en versant 250 $ chaque année, pendant un minimum de trois ans.

Ensuite, le futur membre doit référer cinq membres potentiels.

Ces derniers doivent aussi acheter une carte de membre selon les mêmes termes et référer trois membres potentiels.

Le premier participant doit donc recruter directement ou indirectement 20 nouveaux membres.

Quand ces derniers possèdent leur carte de membre, il se qualifie pour la location d'un véhicule, selon les termes de la présidente du club. C'est dire qu'il peut se présenter chez un concessionnaire automobile et choisir une voiture.

Les restrictions

Mais pas n'importe laquelle. Il doit choisir un véhicule dont la valeur totale n'excède pas 17 500 $, taxes incluses, et il doit signer un contrat de location pour une durée de trois ans.

Dès lors, le club s'engage à lui envoyer chaque mois un chèque de 350 $.

Selon la présidente du club, cette somme correspond au versement mensuel du coût de location d'une voiture de 17 500 $ échelonné sur trois ans.

Mais, des 350 $, le club retient 50 $ plus taxes pour les frais administratifs: ce sont les 50 $ dont parle la publicité. Autrement dit, c'est une chèque de 292,50$ que reçoit le membre pour payer les mensualités de son véhicule de location.

Comme c'est le membre qui signe le contrat de location chez le concessionnaire, c'est lui qui reste responsable du contrat si le club ferme ses portes.

Quant aux 20 personnes recrutées par le nouveau membre, chacune doit, pour se qualifier, en recruter cinq autres qui en recruteront trois autres.

Est-ce difficile de recruter vingt personnes pour obtenir un véhicule ?



Le rayonnement du club

À la question de savoir combien de véhicules le club a sur la route, sa présidente répond 15, pour un minimum de 225 membres.

Mais ce chiffre varie selon les jours : trois semaines auparavant, elle parlait de 21 automobiles, une autre fois, un de ses collaborateurs avance le chiffre de 28.

L'argent du club est administré par une entreprise de gestion.

Son président refuse d'accorder une entrevue à la caméra, mais au téléphone, il fournit des chiffres beaucoup plus conservateurs que ceux de sa cliente. Selon lui, il verse des chèques pour huit voitures.


Les limites du sytème


L'actuaire Ghyslain Nadeau déclare: «C'est un système qui repose sur le fait qu'il faut recruter de plus en plus de gens pour que ça fonctionne. Et on se rend compte assez vite qu'il y a des limites physiques à trouver autant d'individus dans un même réseau.»

Il ajoute : «C'est un système qui généralement dure un an ou deux. Après cette période, la plupart des gens se rendent compte qu'ils ne sont pas cabables de continuer et essentiellement l'entreprise ferme ses portes.»

Mais la présidente du club se fait rassurante en affirmant qu'un compte en fiducie dans une banque de Montréal protège les avoirs des membres. Ce compte est administré par la compagnie de gestion qui fait parvenir les chèques aux membres.

Cependant une employée de la Banque TD est formelle : ce n'est pas un compte en fiducie.

Ce qui détruit l'argument dont se sert la présidente du club pour rassurer ses clients.

Elle va plus loin en soutenant que son système ne relève pas de la vente pyramidale.

Comment reconnaître un système de vente pyramidale

Une avocate spécialiste en droit de la concurrence, maître Sophie Dufour, explique les conditions qui déterminent si on est en présence d'un tel système.



«Quand on parle d'un système de vente pyramidale, essentiellement, on retrouve trois éléments. Le premier, c'est l'obligation pour la personne qui désire devenir membre de ce système, de verser une somme d'argent fixée par le système. Dans un deuxième temps, cette personne est tenue de recruter ou de référer de nouveaux membres. Et si ces deux éléments sont réunis, le résultat, en principe, est une rémunération.»

Dans le cas qui nous occupe, les conditions qui déterminent s'il s'agit de vente pyramidale illégale semblent réunies.

À la question de savoir si elle respecte les articles de la loi sur la concurrence relatifs à la vente pyramidale, la présidente du club dit l'ignorer.

Toutefois elle ajoute qu'elle a présenté sa documentation à certains organismes pour se rassurer.

Parmi ces organismes, elle cite l'Office de la protection du consommateur, la GRC, la Sûreté du Québec et La Facture. Pourtant, aucun de ces organismes n'a conservé de trace d'une rencontre avec la présidente du club.

Dans ses contrats, la présidente du club offre de rembourser les clients qui changent d'idée à l'intérieur de 90 jours.

Afin de vérifier cette assertion, un collaborateur de La Facture a payé 250$ pour adhérer au club. Par la suite, il a téléphoné et écrit pour demander son remboursement. Il n'a toujours pas reçu son argent.

Hyperliens pertinents

La commercialisation à paliers multiples et la vente pyramidale
Site du gouvernement du Canada

Ce qu'est la vente à paliers multiples
Site de l'Office de la protection du consommateur




Coupable, pas coupable, Hydro-Québec frappe fort



Hydro-Québec affirme que le vol d'électricité lui fait perdre des millions de dollars chaque année.

Pour enrayer le problème, la société d'État a recours à une loi remontant au 19e siècle, qui lui permet de condamner un abonné à payer des amendes, même s'il n'est pas coupable du vol.


Le cas d'un rentier de Québec

Un septuagénaire à la retraite de Québec vit non seulement de ses rentes mais aussi des revenus d'un immeuble de six logements.

Au printemps 2001, Hydro-Québec fait une inspection de routine des compteurs des locataires de son immeuble.

Ils sont en bon état, mais l'inspecteur découvre une anomalie dans le branchement d'un des chauffe-eau. Il est relié à la boîte électrique, sans être connecté au compteur.


Ainsi, l'électricité utilisée par le chauffe-eau n'est pas comptabilisée.


Le propriétaire s'explique

Le rentier-propriétaire explique ce branchement irrégulier de la façon suivante : il dit avoir fait réparer la boîte électrique du chauffe-eau à la suite d'un court circuit il y a quelques années.

Selon lui, c'est l'électricien venu effectuer la réparation qui est responsable du branchement irrégulier.

Le problème, c'est que le propriétaire de l'immeuble ne se rappelle pas son nom. Il l'a payé sans réclamer de facture.

De son côté, Hydro-Québec estime que le branchement irrégulier remonte à 1995, et, en conséquence, établit à 367 $ le montant d'électricité détournée. Le propriétaire de l'immeuble et Hydro-Québec s'entendent pour exonérer la locataire de l'appartement de tout blâme. Quant au rentier, il affirme qu'il n'a aucun intérêt à jouer dans une boîte électrique pour faire épargner sept ou huit dollars par mois à un locataire.

La situation semble donc claire.

Peut-être... mais Hydro-Québec frappe


Dans un premier temps, Hydro-Québec réclame à la locataire les 367 $ d'électricité non facturés.

Et la société d'État n'en reste pas là : dans un deuxième temps, elle revient contre le rentier-propriétaire pour lui imposer une amende de 9059,22 $.

Ce montant équivaut à une pénalité égale à trois fois le montant de l'électricité non facturée, plus quatre dollars par jour pour une période d'un peu plus de cinq ans, plus une pénalité statutaire de 100 $.




C'est ce que prévoit la Loi Victoria, qui donne à Hydro-Québec le pouvoir de condamner quiconque détourne du courant ou tolère qu'on le fasse.

Dans ce cas-ci, la société d'État condamne le rentier parce qu'il ne peut identifier la personne qui a fait l'erreur de raccordement et qu'en tant que propriétaire, il est responsable de ses installations.


Coupable, vraiment?

Pourtant la société d'État ne porte pas d'accusations criminelles contre le propriétaire parce qu'elle reconnaît qu'il n'y a pas d'intention criminelle. Pour Hydro, que le propriétaire ait reconnu avoir fait effectuer des travaux équivaut à un aveu de sa part.

Le rentier admet qu'il y a eu un détournement involontaire d'électricité mais s'insurge contre l'accusation de vol d'électricité.


Une accusation non conforme à l'esprit de la loi

La professeure de droit Pauline Roy affirme que la loi Victoria vise à punir les voleurs d'électricité.

Selon elle, ce qui semble clair, c'est que l'accusation d'Hydro, dans ce cas, n'est pas conforme à l'esprit de la loi.

«Ce que la Loi permet, précise-t-elle, c'est d'imposer une sanction punitive à l'encontre de personnes qui agissent de mauvaise foi, dans l'intention de faire un détournement d'électricité. Ce compteur n'est pas le sien et n'a jamais été le sien. Aucun autre compteur n'a été affecté par cette manœuvre-là. Ce sont des éléments qui pourraient permettre à un tribunal d'avoir des doutes», conclut-elle.

Et lorsqu'un juge a suffisamment de doutes, Hydro-Québec perd son procès et ne peut plus exiger de pénalités.

Mais pour cela, il faut vouloir se battre.

Le propriétaire y a songé.

Il affirme cependant qu'il n'a pas les moyens de dépenser de 25 000 à 30 000 $ dans un procès contre Hydro-Québec.

Un règlement à l'amiable

Entre temps, la société d'État lui propose un règlement à l'amiable. Elle propose de régler le litige pour 3677,40 $ si le propriétaire accepte de reconnaître sa culpabilité dans une déclaration écrite.

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Son avocat lui conseille d'accepter ce règlement. Mais il refuse de signer un papier qui le reconnaît coupable de subtilisation d'énergie.

À sa demande, Hydro-Québec a retiré toute allusion à la notion de vol dans une nouvelle version du règlement à l'amiable, qui ne mentionne plus que le montant à rembourser.

Il faut savoir que si le propriétaire avait pu présenter une facture en bonne et due forme, Hydro-Québec aurait peut-être refilé l'amende à l'électricien.

Depuis, la direction d'Hydro-Québec a demandé à son vérificateur interne d'ouvrir une enquête sur la division du vol d'énergie.

Hyperliens pertinents

Hydro-Québec


 

 

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