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L’abondance du homard pourrait-elle offrir plus de travail aux pêcheurs?

À travers son analyse du marché, l’Institut de recherche en économie contemporaine pressent que l’avenir des pêches au Bas-Saint-Laurent et en Haute-Gaspésie reposera principalement sur la pêche au homard.

Gros plan sur un homard

À mesure que les eaux se réchauffent, les homards remontent dans l'estuaire du Saint-Laurent et la biomasse grossit rapidement. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Jonathan Villeneuve

La Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk, qui détient trois des quatre permis exploratoires au homard octroyés dans le secteur de la Matanie et de la Haute-Gaspésie, est optimiste quant à l’obtention de permis de pêche commerciaux en 2025, alors que la saison de pêche au homard s’est ouverte samedi.

À mesure que les eaux se réchauffent, les homards remontent de plus en plus dans l'estuaire du Saint-Laurent et la biomasse grossit rapidement. Ils ont maintenant élu domicile dans des zones où ils étaient normalement quasi absents, notamment en face de la Matanie et de la Haute-Gaspésie.

Depuis 2018, la Première Nation pêche la ressource dans la zone 19A et aide le ministère des Pêches et des Océans du Canada (MPO) à évaluer son abondance, sa distribution et sa productivité. L'an dernier, le ministère a transformé les permis de pêche expérimentaux en permis de pêche exploratoires.

Dans une fiche technique qui fait état du prix du homard depuis 2000, l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC) indique qu’il faut s’attendre à ce que les débarquements de homard continuent d’augmenter. L’Institut juge que de nouvelles pêcheries commerciales pourraient bientôt voir le jour au Bas-Saint-Laurent, dans le nord de la Gaspésie ainsi que sur la Côte-Nord.

La zone 19A s’étend de Montmagny à L’Anse-à-Mercier environ, selon le site du MPO.

Un des auteurs de la note, le chercheur Gabriel Bourgault-Faucher, est d’avis que l’abondance de homard est un levier dont on devrait se servir pour l’avenir des pêcheries, notamment au Bas-Saint-Laurent ou en Haute-Gaspésie, où c’est particulièrement difficile avec le déclin de la crevette et du turbot.

C’est une bonne nouvelle au travers d’autres nouvelles qui sont moins réjouissantes.

Une citation de Gabriel Bourgault-Faucher, chercheur à l'IRÉC
Gabriel Bourgault-Faucher répond aux questions par visioconférence.

Gabriel Bourgault-Faucher est chercheur à l'IRÉC et membre du collectif Mange ton Saint-Laurent. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada

Le directeur des pêches commerciales pour la Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk, Guy Pascal Weiner, en fait la même lecture. Je pense que la filière homard va se développer au Québec. L’émission de permis [commerciaux] pour certains secteurs est imminente, précise-t-il.

M. Weiner souhaite par ailleurs que le MPO transforme les trois permis exploratoires que détient la Première Nation en permis commerciaux pour la saison de pêche 2025.

Je crois que tous les efforts auront été déployés et les chiffres analysés justifiant ainsi la passation de nos trois permis au stade commercial, ajoute-t-il. De ne pas l’obtenir l’an prochain, ça ne fait que retarder certains investissements, mais il ne faudrait pas trop que ça traîne.

Tant qu’on n’aura pas un permis commercial entre les mains, on n’a rien.

Une citation de Guy Pascal Weiner, directeur des pêches commerciales pour la Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk
Guy-Pascal Weiner.

Guy Pascal Weiner est directeur des pêches commerciales pour la Première Nation Wolastoqiyik. (Photo d'archives)

Photo : Gracieuseté : Guy-Pascal Weiner

Par ailleurs, le MPO tente d'acquérir plus de connaissances sur la pêche au homard dans la zone de pêche 18, qui s’étend de Tadoussac à Natashquan, sur la Côte-Nord. Le ministère compte distribuer des permis de pêche exploratoires pour la saison 2024, qui permettront de documenter la capacité du stock à soutenir éventuellement une pêche commerciale.

Hausse des débarquements à travers les années

Selon l’analyse de l’IRÉC, les quantités de homard débarquées sont passées de 3711 à 13 777 tonnes de 2009 à 2023. En parallèle, la valeur de cette pêche est passée de 45,2 à 224,7 millions de dollars, donnant ainsi raison à la Première Nation du Bas-Saint-Laurent d’avoir ce crustacé dans sa mire.

Il n’est aucunement surprenant de constater que le homard d’Amérique est désormais la pêcherie la plus lucrative au Québec maritime, ayant détrôné depuis peu le crabe des neiges, relève Gabriel Bourgault-Faucher.

C’est une ressource sur laquelle on peut dorénavant tabler et se fier, renchérit Guy Pascal Weiner. En 2018, les débarquements étaient plutôt maigres et les opérations déficitaires, rappelle le directeur des pêches commerciales de la Première Nation.

Cette espèce ne subit pas les soubresauts du marché comme d’autres poissons, selon lui. Ça justifie l’élaboration de projets de développement économique autour de cette ressource-là.

M. Weiner fait valoir que le MPO pourrait distribuer davantage de permis de pêche au homard dans la zone 19A. Il y a de la place pour d’autres personnes, mais il faut y aller de façon prudente dans l’émission de permis commerciaux. Alors que le ministère évalue toujours la productivité de l’espèce, il faut être conséquent de ce côté-là, avertit-il.

Un pêcheur qui lance une bouée.

En 2022, la pêche au homard a rapporté 76 M$ en Gaspésie. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

Le chercheur de l’Institut croit d’ailleurs que l’industrie ne devrait pas se surspécialiser autour de la pêche au homard. Elle devrait plutôt, précise-t-il, se servir de ce levier financier pour ouvrir la pêche d’espèces sous-exploitées ou méconnues afin d’éviter les mauvaises surprises.

On ne doit pas se jeter les yeux fermés uniquement sur le homard et ne plus voir le potentiel d’autres espèces, ce qui ne se fait pas historiquement dans l’industrie des pêches et qui pourtant peut être une avenue pour améliorer la résilience de cette industrie dans le futur, mentionne Gabriel Bourgault-Faucher.

Des prix toutefois volatils

Toujours selon la fiche de l’Institut de recherche en économie contemporaine, le prix moyen au débarquement du homard en 2023 s’est établi à 16,31 $ le kilogramme. Il était légèrement inférieur à la moyenne observée au cours des deux dernières décennies.

De 2000 à 2022, notent les chercheurs, la moyenne des prix au débarquement, ajusté à l’inflation, était de 16,39 $ le kilogramme.

Selon l’IRÉC, l'évolution du prix au cours des années révèle tout de même sa volatilité. Les prix annuels moyens varient de plus ou moins 3,15 $ d’une année à l’autre. La variation, croit M. Bourgault-Faucher, pose un risque pour la rentabilité de la pêche commerciale si l’on considère la minceur de ses marges de profit.

D’une année à l’autre, c’est parfois drastique, dit-il. Ça peut carrément compromettre la rentabilité d’une saison de pêche, et de manière consécutive. Les pêcheurs ne sont parfois plus capables de faire leurs frais en vendant leur homard à ces prix-là.

Par exemple, en pleine pandémie, le prix moyen au débarquement avait plongé à 12,38 $ le kilogramme. Pour les homardiers, il s’agissait d’un prix qui atteignait à peine le seuil de la rentabilité. L’année suivante avait toutefois été lucrative puisque le prix offert avait atteint 19,98 $ le kilogramme, un record dans l’histoire récente de cette pêcherie.

Le chercheur explique que la conjoncture de l’économie mondiale et les quantités globales de homard pêchées dans les régions de l’Atlantique nord sont derrière les chutes ou les flambées de prix.

Dans son ensemble, les prix proposés aux pêcheurs étaient plus intéressants au début des années 2000, mais les pêcheurs arrivaient à quai avec de plus petites quantités de homards, ce qui baissait la valeur relative.

Dorénavant, la valeur des débarquements a beaucoup augmenté, souligne M. Bourgault-Faucher. Cette activité génère maintenant plus de valeur économique, même si le prix accordé aux pêcheurs décroît. La hausse des quantités de homard au débarquement est depuis quelques années salutaire pour ceux qui prennent la mer.

Les premiers débarquements ont par ailleurs eu lieu dimanche en Gaspésie. En poissonnerie, le homard vivant se vend 8,50 $ la livre et le homard cuit, 11 $ la livre.

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